Publicité ciblée

3831_1
    Il y a quelques semaines, je faisais un petit tour sur Gleeden pour les besoins d’une nouvelle, qu’allez vous imaginer 😉  – et cela m’avait inspiré un début d’histoire. Aujourd’hui, une publicité s’incrustant sur mon fil Facebook me donne une autre idée, toujours sur les sites de rencontres, mais plus romantique… peut-être le début d’une romance à l’eau de rose ?

***

    Claire parcourt d’un œil distrait son fil d’actualités Facebook. Il y en a trop, elle se noie chaque jour un peu plus, sans compter les publicités – appellées pudiquement « pages sponsorisées » – qui se glissent maintenant régulièrement au milieu des news de ses « amis ». Soudain, la jeune femme marque un temps, interrompt le glissement de la souris et se perd dans la contemplation d’une annonce pour un site de rencontres, Attractive world. Rien que le nom du site la fait rire, mais le profil mis en avant pour l’attirer beaucoup moins.
    Un homme en costume la transperce de son regard bleu glacier, un regard chaleureux pourtant, presque candide, accompagné d’un sourire rayonnant. Il est bronzé comme un moniteur de ski, ce qui détonne un peu avec l’élégant costume. Sous la photo, sa profession : éditeur. Le pompon se dit Claire, tâchant de sauver par l’humour le peu de dignité qui lui reste. Car elle vient de tomber amoureuse d’une photo, comme ça, en quelques secondes… elle ne peut plus en détacher son regard. C’est vraiment n’importe quoi… une vraie midinette ! Claire tente de reprendre sa promenade sur son fil d’actus, mais sans succès, sa main reste paralysée sur la souris et ses yeux fixés sur la silhouette de l’homme en vitrine pour « Attractive world ». Existe t-il au moins ? Ou n’est-il qu’un attrape-nigaude pour les filles dans son genre ? Espérant se débarrasser de son étrange coup de coeur, Claire enregistre une capture d’écran et tente de passer à autre chose, maintenant qu’elle l’a sauvegardé quelque part. Peine perdue. Le regard bleu la hante de plus belle. Autant prendre le mal par la racine, se plonger jusqu’au cou dans cet accès de folie. Elle va s’inscrire sur ce site, OK, ils ont gagné, c’est la preuve que la publicité fonctionne ; elle va le chercher, le trouver, elle engagera la conversation. Il sera sans doute pédant, arrogant. Comment pourrait-il en être autrement, il est si beau ! Et elle pourra l’oublier enfin au lieu de fantasmer comme une folle sur une simple photo. Claire a un petit doute quand même, un homme qui aime les livres au point d’en faire son métier sera forcément brillant, fin, cultivé… Elle aime tellement les livres elle aussi, et tout ce qui va autour, les librairies, les bibliothèques, les écrivains… Les éditeurs. Elle écrit aussi, modestement… Tiens, elle pourrait écrire un roman et lui soumettre un manuscrit ? Tout pour entrer en contact d’une manière ou d’une autre ! Claire recule devant l’obstacle. Ça lui prendrait un temps infini, autant profiter des raccourcis offerts par le monde virtuel sans passer par la vraie vie !
    Excitée comme une puce, elle crée son profil à toute vitesse, insiste sur son amour des livres dans sa description et se met aussitôt en quête. Elle le trouve rapidement ; sur la publicité, son âge, sa ville figuraient. Elle consulte sa fiche le cœur battant, elle aurait aimé en savoir plus sur sa maison d’édition, mais il ne donne aucun détail. Publie t-il des romans policiers, de la science-fiction, des histoires d’amour ? Claire sourit, elle vient d’avoir une idée. Elle pourrait lire les livres qu’il publie, créer un blog de chroniques, devenir partenaire de sa maison d’édition, si elle réussit à l’identifier ? Non, c’est trop long aussi. Il n’y a pas à tergiverser plus longtemps, elle va lui écrire directement, elle s’est inscrite sur le site pour ça, elle ne doit plus reculer, au risque de s’enfermer dans ses obsessions. Elle tourne et retourne un mail dans ses pensées, avant d’opter pour la simplicité.
    – Bonjour, j’aime beaucoup les livres moi aussi, je suis curieuse de connaître le type de romans que vous publiez ?
    La réponse ne tarde pas, douchant quelque peu son enthousiasme.
    – Merci pour votre message, je suis ravi ! C’est rare que les femmes prennent l’initiative, même en ces temps libérés… je suis éditeur dans le domaine juridique, nous publions des manuels pour les étudiants, des thèses… Autre chose que vous voudriez savoir mademoiselle curieuse ?
    Le droit. Pas très glamour, c’est même carrément réfrigérant. Claire est déçue, il ne la fait plus rêver, son coup de foudre s’est même envolé aussi vite qu’il était survenu. Mais il a de l’humour et ça compense un peu le côté « manuel de droit ».
    Et il a quand même les yeux très bleus et un sourire charmeur.

    Photo : film You’ve got mail (j’ai failli mettre la publicité en question, mais je crois que je préfère la garder pour mon usage personnel 😉 )

7 commentaires

  1. Clarissa a écrit :

    Tiens, c’est une idée ! C’est toi qui assures sur les thrillers … dans l’avant-dernier Osez sur l’hôtel, excellent scénario !

    1. Clarissa a écrit :

      Cher Matou, il faudra nous raconter !

      1. Le Matou liberti a écrit :

        J’ai écrit quelques histoires dans lesquelles je raconte certaines de mes rencontres… Je t’en enverrai une de temps à autre… à +

        1. Clarissa a écrit :

          Juju, tu sais t’y prendre avec les filles : une première approche romantique (les fleurs…), et hop ! oui, on peut sûrement tirer quelque chose d’un juriste à lunettes, je vais y réfléchir !

  2. juju051 a écrit :

    le droit, la justice et ses….raideurs!
    Je n’avais jamais entendu parler du site où tu t’étais inscrite. Moi j’étais plus tchatche.com et j’en ai quelques souvenirs…grâces aux orchidées qui étaient une super entrée en matière détournée.
    Éditeur en droit, oui et alors? en tout homme sommeille un coquin, tu devrais développer.

  3. Le Matou liberti a écrit :

    Intéressant en plein d’aspect véridique…
    J’ai pendant quelques années rôdé sur les sites de rencontre – sérieux et coquins – et j’y ai fait de belles rencontres
    Il suffit, une fois le contact établi, mettre carte sur table : c’est pour un coup d’un soir ou pour plus longtemps…

  4. Louise a écrit :

    Tu peux aussi en faire le début d’un thriller, à la Misery…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

À propos de l’auteur

Blogueuse et autrice