Lundi 31 octobre, j’ai participé à la soirée Master Squat invite Kink Me : Dark night.
Ce fut une soirée intense, avec la foule des grands jours, une affluence joyeuse, joueuse, fetish, pleine d’énergie festive… J’étais accompagnée d’un ami qui vivait une soirée fetish pour la première fois, je l’ai redécouverte à travers ses yeux, c’était comme si je vivais une nouvelle première fois moi aussi !
Le meilleur de la Squat et de la Kink Me réunis : le son, des participants libres, épris de musique et de jeux, les amis croisés sans cesse, les rencontres…
La soirée m’a donné une idée d’histoire, une histoire inventée, mais le lieu existe bel et bien, et les performances bdsm sont réelles : elles se sont déroulées lundi dernier, et lors d’une Master Squat précédente.
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Léa et Pierre se réjouissent de la soirée qui les attendent : une soirée techno et fetish à la fois, dans un lieu improbable avec ses lustres, ses tableaux géants, et doté de plusieurs portes dimensionnelles, qui les font peu à peu passer de l’autre côté du miroir.
Léa a l’impression de partir en voyage : le contrôle des billets et des sacs à l’entrée, avant d’atteindre le vestibule où ils se peuvent se changer. Ils saluent au passage leurs amis et connaissances – Léa est en train d’enfiler sa mini robe, de changer de chaussures, et c’est parfois acrobatique d’embrasser une amie, avec une jambe en l’air. La transformation est rapide, il s’agit surtout d’enlever des vêtements superflus, manteau, veste, pull… pour ne garder qu’une petite robe noire ultracourte qui lui colle à la peau. Pierre sera son soumis ce soir, il ne garde que son pantalon en cuir, un harnais de cuir, et son collier, en cuir lui aussi. Léa résiste à l’envie de palper son poitrail de nageur, elle se contente de respirer dans son cou ; elle adore son parfum naturel, rehaussé d’une pointe de cuir. Bientôt, il aura bien chaud et sentira meilleur encore…
Vite, remettre toutes leurs affaires au vestiaire, et s’élancer vers la soirée !
De grandes portes s’ouvrent sur le bar, lieu de fête à part entière. Ils s’y attardent un moment, le temps d’échanger avec des amis, profitant de pouvoir discuter, car ensuite ce sera bien plus difficile, à moins de se coller sa bouche aux oreilles des uns et des autres, ce qui a aussi son charme. Ils entendent les échos du dance floor juste derrière, assourdis, Léa se sent appelée. Les bavardages vont bon train, tout le monde est super looké, c’est le lieu idéal pour admirer le flot des tenues fetish qui vont et viennent, se pressent autour du comptoir, pataugent joyeusement dans ce petit bain avant la plongée dans le grand bain. Non loin, un espace fumeur très animé, haut lieu de rencontres et de discussions.
De nouvelles portes de chaque côté du bar mènent à l’immense dance floor. Léa les pousse résolument, impatiente, littéralement aspirée par le son à plein volume. Elle marque un temps : des flots de musique techno tourbillonnent autour d’elle, envahissent chaque cellule de son corps, circulent à toute allure dans ses veines et l’enflamment. Léa se force à respirer, elle laisse le son s’engouffrer en elle, comme un torrent qui se rue dans une vallée, submergeant tout sur son passage, elle se fond avec la musique, y ajoute ses battements de pieds, de cœur, elle ne fait plus qu’un avec la musique et la foule qui s’agite. Elle se rapproche de Pierre, heureuse de le sentir sur la même longueur d’onde ; ils dansent, ivres de musique. Léa goûte le bain de foule, le bain de musique, heureuse de retrouver des amis et connaissances, de croiser des regards joyeux. Elle se faufile à travers les danseurs, serrant fort la main de Pierre ; ils se perdraient vite avec les mouvements de la foule…
Le DJ trône au fond de la salle, mis en valeur par un écran géant au-dessus de lui qui diffuse des extraits de films fetish : un kaléidoscope d’images qui parlent directement à son inconscient de façon hypnotique, au rythme de la musique… Devant ses platines, une scène est équipée d’une immense cage ; des performances sont sûrement au programme se réjouit Léa. Il faudra veiller à ne pas être occupés ailleurs.
À l’étage, accessible depuis le vestiaire, deux salles de jeux proposent leurs tapis moelleux pour de tendres ébats, et leurs équipements bdsm pour des sensations plus piquantes. La deuxième salle en particulier regorge d’équipements, un vrai donjon pour toutes les pratiques : une sling, des cages, un banc à fessée, une croix de St André… Pour l’instant, les gens déambulent, regardent sans oser. Certains, moins timides, se lancent déjà, pour profiter des lieux encore peu fréquentés : un homme est attaché à la croix de St André, ses tétons sont pincés, tordus, sa peau griffée avant d’être fouetté d’un long martinet ; un autre s’appuie sur le banc, il reçoit des claques sonores sur les fesses. Sa dominatrice lui grimpe carrément dessus pour un rodéo improvisé.
Léa s’installe sur le sol pour mieux jouir du spectacle, et réclame d’autorité un massage des pieds. Pierre s’exécute aussitôt, appliqué, soucieux de bien faire. Bercée par la musique et le massage, Léa s’évade, distraite par les ébats autour d’eux. L’ambiance se réchauffe de plus en plus ! Son regard erre sur les films X diffusés sur un écran sans vraiment les regarder. Ils sont amusants, vintage, et datent des années 70 ou 80 à vue de nez. L’un d’entre eux retient son attention : des femmes sont enfermées dans de petites alcôves en bois, seul le bas de leur corps dépasse à l’extérieur. Des hommes se présentent, et les prennent. Elles ne voient jamais leur visage ; eux voient seulement leurs jambes ouvertes. L’anonymat est total, aucun échange de regards, seulement l’emboîtement des corps, directement. L’une des femmes a les bras attachés, les autres sont libres, et bougent au fil des assauts subis. On devine l’action en regardant leurs visages crispés de plaisir, leurs mouvements désordonnés. Parfois le point de vue change, on suit les hommes qui s’activent entre ces jambes anonymes.. Étrange film, il ne ressemble à rien de connu. Troublée malgré elle, Léa se secoue, elle a envie de bouger, si elle reste encore devant ces images infernales, elle va finir par se jeter sur Pierre qui lui masse les pieds si sagement. Il a beau être son soumis ce soir, ce n’est pas une raison pour n’en faire qu’une bouchée, il est à peine minuit en plus ! Elle se relève vivement et entraîne son compagnon vers la piste, histoire de se changer les idées en dansant.
Une performance est annoncée, Léa se précipite vers la mezzanine mixte — celle d’en face est réservée aux filles — tirant Pierre par la main. Accoudés au balcon, ils regardent la foule des danseurs qui évoluent comme des vagues, éclairés de spots mouvants. La musique, la foule, les images sur l’écran composent un tableau fetish et futuriste à la fois. Léa est parcourue de frissons d’impatience et de désir. Le bras nu de Pierre contre le sien, un contact léger, non prémédité, lui donne envie de se tourner vers lui, d’embrasser son cou, de caresser son ventre… ce n’est pas le moment, elle tient à voir le spectacle sans se laisser distraire ! L’organisateur demande aux danseurs de descendre de l’estrade, le show sur le point de commencer.
Un homme nu, vêtu d’un simple boxer de cuir, s’installe sur une chaise. Une dominatrice entame une danse autour de lui, une danse rapprochée, pendant qu’il ferme les yeux et renverse sa tête en arrière. Léa plisse les yeux, mais ne parvient pas à deviner leur manège. Derrière l’homme, deux jeunes femmes captives dans une grande cage dansent et s’amusent, apportant une touche insouciante à la mise en scène. La dominatrice recule pour juger de l’effet : elle vient de planter tout un chemin d’agrafes le long du torse et du ventre de son soumis à l’aide d’une grande agrafeuse. Elle glisse un ruban noir entre les agrafes et tisse un joli corset accroché à même la peau. Une touche de féminité sur ce corps musclé et bien bâti.
Une autre dominatrice apparaît avec deux soumis. Léa frémit d’excitation tandis que la dominatrice entoure les deux soumis de fil de fer barbelé. Chaque pointe s’enfonce dans les chairs et les muscles des hommes qui grimacent, mais tiennent bon. La dominatrice poursuit son ouvrage, elle continue de leur tourner autour, déroulant son fil hérissé d’épines de métal. Ils souffrent, s’offrent, et aiment cette douleur, l’attention dont ils font l’objet. Au plaisir d’être lié, contraint, s’ajoute le plaisir de souffrir ! Léa devine que les deux soumis entament leur voyage vers le subspace. Leurs yeux se révulsent par moment, ils s’abandonnent, se remettent totalement entre les mains de leur dominatrice qui renforce son emprise, les encercle de façon plus serrée encore.
Elle les libère, leur tourne autour vivement pour dévider son fil, infligeant au passage de nouvelles piqûres de fer, et révélant la peau parsemée de points rouges. Elle leur ordonne de s’allonger et s’empare de bougies enflammées. Elle est belle comme une prêtresse de cérémonie antique, une créature au service du démon. La musique techno pulse toujours, entêtante, elle accompagne le rituel en cours. La dominatrice s’approche et penche ses bougies, des flots de cire se déversent sur les dos, les ventres des soumis, les brûlent vif. Elle leur demande de lui présenter telle ou telle partie de leur anatomie, selon sa fantaisie : à quatre pattes, sur le dos, sur le ventre… rien ne leur sera épargné ! La cire coule sur le visage, sur la langue d’un des soumis qui semble en redemander, avant d’être versée son sexe aussi, jusqu’à le faire disparaître sous une épaisse couche de cire. Les deux hommes sont méconnaissables, entièrement recouverts de pastilles de cire noire et rouge, ils forment un tableau contemporain inédit.
Sur l’estrade, un cap est franchi, le soumis le plus masochiste fait l’objet de pratiques extrêmes. Léa ne peut plus détacher ses yeux de la scène, elle vit la séance en direct, la ressent dans son corps, connectée à ce soumis. Il n’a pas un instant de répit, sa bouche est agrafée, ses bourses clouées sur une planche en bois, il est fouetté… Elle observe, fascinée, de plus en plus en plus excitée. Elle ne peut nier son côté sadique, la souffrance l’excite — la souffrance consentie bien sûr, réclamée, salvatrice et libératrice des deux côtés.
La pointe de désir au creux de ses jambes devient un incendie. Elle appuie sur la tête de Pierre pour qu’il s’agenouille. Ce n’est pas réfléchi, c’est un réflexe, elle veut prendre part à sa façon à la cérémonie. Un spectacle interactif !
Pierre comprend tout de suite, il se glisse à terre, se faufile entre ses jambes. Léa se félicite d’avoir mis une robe longue pour une fois, et se positionne pour mieux s’installer, emprisonnant son soumis entre ses jambes. La langue de Pierre se trouve juste au bon endroit. Léa fixe son attention sur le spectacle, et tâche de l’oublier, contente comme ça.
Le soumis sur scène se tord de douleur, à l’instar de Léa qui s’accroche à la balustrade et se tord de plaisir sous les doux les coups de langue de Pierre. Elle tente de résister, mais il la connaît bien, et sa jouissance monte, avant d’exploser dans sa bouche. Le soumis sur l’estrade atteint lui aussi l’acmé, en un paroxysme de souffrance. Ils jouissent à l’unisson, de plaisir, de souffrance, décharge électrique dans leur corps, déflagration dans leurs têtes… Leurs cris se perdent dans l’océan de musique techno.
Léa s’affaisse à moitié sur Pierre, gémissante — heureusement avec la musique, personne ne l’a entendue. Elle reprend son souffle et jette un rapide coup d’œil à ses voisins ; tout va bien ils ne sont aperçus de rien, les yeux rivés sur le spectacle. Il se termine, la dominatrice relève son soumis et baise sa bouche agrafée, avant de racler au couteau la croute de cire qui recouvrent le corps de ses deux soumis. La performance s’achève sous les applaudissements. Léa relève Pierre et le serre contre elle. Elle murmure à son oreille, taquine.
— Tu as raté quelque chose !
Pierre se récrie, il s’est senti comblé au contraire, parfaitement à sa place, à moitié étouffé, étranglé par ses jambes qui se refermaient vivement selon ce qui se passait sur la scène, asphyxié par ses parfums… au paradis des soumis !
Juste avant de partir, quelques photos vite fait