Moi qui ai toujours la bougeotte, j’aime me confronter à l’une de mes principales phobies : l’enfermement. Après avoir vécu des séances de shibari, une mise en cage (un bref moment !), j’ai expérimenté cette fois la momification.
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J’ai déjà testé « l’emballement » à deux reprises en soirées, lors de séquences très courtes, distraite par la musique, les amis tout autour de moi… J’avais envie de renouveler cette expérience qui m’avait bien plu, d’aller plus loin dans un cadre intime, de prendre vraiment conscience des sensations, sans contrainte de temps.
Sacha Bel-Ami m’a offert ce cadeau. Il pratique la forniphilie (objectification des corps) depuis plusieurs années, une pratique exercée dans le cadre de séances BDSM ou, comme je l’ai fait, dans le but de découvrir de nouvelles sensations, de lâcher prise.
Sacha me montre le cellophane qu’il va utiliser, très fin, comme un ruban qu’il va dérouler autour de moi. Il utilise du cellophane plus large en soirée fetish pour aller vite, mais là, on peut prendre tout notre temps. Il m’invite à me mettre debout, jambes serrées, et commence à enserrer mes pieds dans le film plastique, avant de remonter le long de mes jambes, m’enrubannant peu à peu. Nous ne bavardons plus à bâtons rompus, je fais le vide dans ma tête, je chasse toutes mes pensées parasites pour mieux me focaliser sur mes ressentis.
Je m’inquiète quand mes mains sont immobilisées à leur tour, j’ai envie de gigoter, de bouger ! Pendant un centième de seconde, je suis à deux doigts de vouloir me libérer. Mais l’impression ne dure pas, je respire, me concentre. Je sens Sacha très proche, à l’écoute ; il me demande si ça va, s’il peut continuer ? Oui ! Je perds l’équilibre, il me retient dans ses bras, sns cesser d’enrouler le cellophane autour de mon corps, avec adresse. Parfois, il doit me laisser un bref instant, il me reprend ensuite contre lui le plus vite possible, peau contre peau. C’est comme une danse, je tangue un peu à chaque tour, avant de pouvoir m’appuyer en confiance sur lui.
— On s’arrête aux épaules ?
Je suis tentée de poursuivre l’expérience, d’être emmaillotée jusqu’aux yeux, d’éprouver des sensations proches du vacum bed, avant de renoncer. Je suis bien comme ça, tenue, maintenue, dans un cocon, bien serrée… je ne veux pas risquer de me sentir oppressée.
Sacha m’aide à m’allonger, je suis complètement immobilisée, prisonnière de cette seconde peau. Je me sens lourde, incapable du moindre geste, comme lorsqu’on est sur le point de s’endormir : cet état second agréable où l’on est déjà ailleurs, avec des images incohérentes qui viennent de nulle part, des tressaillements électriques, avant une détente totale du corps.
Il enduit le cellophane de lubrifiant et fait glisser ses mains tout le long de mon corps momifié, comme un massage de ma seconde peau. Elle est si fine, si collée à la mienne que je sens bien ses mains ; un contact un peu différent, indirect, à travers le voile pudique du cellophane qui induit une petite distance. Une expérience fetish délicieuse ! C’est bon de m’abandonner, je ne peux rien faire de toute façon, il n’attend rien de moi, juste de me laisser faire, et de profiter.
Il me relève un peu, s’installe derrière moi, et m’invite à m’appuyer sur son torse, se faisant objet à son tour, un fauteuil avec un dossier accueillant. Il me masse longuement, me caresse à travers le cellophane. J’ai fermé les yeux, j’ai perdu la notion du temps, la perception des contours de mon corps, je suis transformée, métamorphosée, mes sensations ont changé. Je suis devenue une nouvelle créature, dotée d’une nouvelle peau et de nouveaux ressentis !
Il me demande une fois ou deux si je veux être libérée. Je commence par refuser, j’ai envie de prolonger les sensations, avant de finalement accepter un peu plus tard ; c’est le bon moment. J’ai bien chaud sous le film plastique collé à ma peau, mais je crois que Sacha a encore plus chaud que moi ! Il ouvre une brèche entre mes pieds et découpe le film tout le long de mon corps, tel un chirurgien, avant d’écarter les deux pans de plastique. Me voilà écorchée vive ! Un coulis d’air froid me rafraîchit agréablement. Il poursuit en retirant délicatement le cellophane qui s’est accroché à ma peau en sueur ; je mue et je me sens légère, délivrée de mon cocon qui me serrait si fort !
Je me sens « moi » à nouveau, mais pas tout à fait, quelque chose a changé, sans que je réussisse à me l’expliquer… Il y a cette légèreté, la joie de retrouver ma liberté de mouvement, teintée d’une légère déception : c’est déjà terminé. Il me faut à nouveau être « actrice », décider, choisir… c’était si bon de me « reposer » entre les mains de Sacha !
Sacha m’explique les origines de son goût pour la forniphilie, un art peu répandu en France — je pense qu’il en est même le seul représentant ! Il a eu le déclic en regardant les BD de Simon Besnon et les photos de Jeff Gord. Sacha sait transformer un homme ou une femme en table basse, en tabouret, en poupée mannequin dans sa boîte transparente… Très créatif et ingénieux, il adore inventer des mises en scène pour exaucer nos fantasmes les plus bizarres ! Le tout dans des positions agréables, dans lesquelles on peut tenir des heures.
Je me souviendrai longtemps d’une de ses performances : une jeune femme reliée à un tabouret, ne faisant qu’un avec lui, offrait sa bouche pour sucer un homme qui s’y étais assis. Un spectacle beau et troublant !
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Un ami sur Facebook a commenté mon récit, je recopie ici ses idées :
4 commentaires
J’ai préféré éviter la tête et m’arrêter aux épaules pour cette première fois… Oui, je percevais bien tout ce qui se passait, mais un peu comme un rêve éveillé, dans une ambiance « ouatée », comme un demi-sommeil, avec perte des repères de temps… je fermais les yeux, ce qui a dû renforcer encore cette impression Très bon week-end aussi !
pensez-vous, un jour, essayé le corps complet incluant la tête?
Je ne pense pas ! Mais qui sait…
Bonjour clarissa, je serais completement oppressé surtout avec un « emballage » de la tête. Edt ce que les sens sont en eveil? Bon we à toi
Bises
Pierre