Flore Cherry a lancé récemment un nouveau podcast, Phantasme, où elle décrypte les fantasmes, à travers des témoignages. J’ai écouté ceux portant sur la soumission et sur le fétichisme des pieds, ils m’ont passionnée !
Flore m’a interviewée aussi, et le podcast vient de sortir… Vous pouvez écouter mes confidences les plus intimes sur toutes les plateformes, par exemple Deezer, Spotify, etc.
Ce stress, ce trac … Je ne sais même pas si je vais oser m’écouter !!
Quand Flore m’a proposé de m’interviewer, j’étais à la fois très flattée, ravie (mon côté exhib’ ^^), et pétrifiée d’avance – fichue timidité.
Ça ne s’est pas arrangé à l’approche de l’enregistrement. J’ai même tenté de me défiler au dernier moment en raison d’un mauvais rhume et de ma voix cassée (j’espère que ça ne s’entend pas trop), mais il s’est avéré trop difficile de décaler — un studio d’enregistrement, ça ne s’annule pas au pied levé !
Restait à choisir le fantasme sur lequel j’allai discourir – ils sont nombreux… «Les massages des pieds et le bdsm sont déjà pris», me prévient Flore, qui me connaît un peu. De fil en aiguille, je choisis finalement le fantasme de «l’inconnu», un thème qui revient souvent dans mes histoires : ils ne se connaissent pas, ils échangent un regard, et tout bascule, le temps d’une soirée.
Je me souviens du jour de l’enregistrement comme si c’était hier, de mon stress et de ma timidité en arrivant. Je devine l’équipe technique de l’autre côté de la vitre – gloups, tant de moyens déployés pour ma petite personne ! Je préviens Flore que ça va être compliqué, je me décompose déjà sur place, je perds toute capacité de réflexion, le fil de mes pensées, je vais bafouiller, perdre mes mots… Elle désamorce tout de suite mon début de panique en souriant, avec cette phrase mi taquine mi affectueuse qui me donne un petit coup de fouet !
— Allons Clarissa, ça fait bien dix ans qu’on se connaît, et dix ans que tu me dis ça !
Je déglutis ; elle a raison, je ne vais pas jouer les débutantes du bal toute ma vie, alors que j’ai quand même pas mal roulé ma bosse !
Je m’assois à côté d’elle, un casque sur les oreilles, j’essaie de ne pas penser aux responsables du son derrière la glace, et c’est parti. Et là, je reconnais tout le talent de Flore, son art de poser les bonnes questions avec son sourire bienveillant, de me faire réfléchir à ce fantasme qui m’accompagne depuis longtemps comme un ami fidèle : le goût des inconnus.
Je « m’étends sur le divan », mon stress s’envole, et je tente de percer ce mystère avec son aide : pourquoi et comment — je n’y ai jamais vraiment réfléchi avant. C’est un fantasme très répandu, quand il en existe tant d’autres bien plus originaux, mais c’est l’un de mes fantasmes les plus forts. Il imprègne de nombreux textes, et déborde aussi sur ma vraie vie, il faut bien l’avouer. L’inconnu, qui n’a aucun a priori sur moi, dont je ne sais rien, qui ne m’est rien amicalement ou sentimentalement, et avec qui je peux laisser parler mes envies brutes, sans pression, sans engagement, sans stress, sans me soucier de ce qu’il va penser de moi…
C’est un fantasme qui trouve sa source au tout début de ma vie sentimentale, je pense. Au collège, je me montrais timide avec les garçons de ma classe (trop taquins), et j’étais dûment chaperonnée par mes «meilleures amies», toujours à l’affut, jugeant sévèrement et démolissant le moindre «crush» naissant (du moins, c’est ce que j’imaginais). Finalement, mon premier baiser n’a pu avoir lieu qu’en dehors de mon milieu scolaire et de loisirs, comme c’est le cas pour beaucoup de jeunes je pense. Enfin libérée du regard protecteur et castrateur des copines, et de leurs bons «conseils», lors d’un séjour linguistique, choisi par d’innocents parents pour améliorer mon anglais. Et plus tard… bon, je ne suis pas là pour raconter ma jeunesse perdue ^^
Aujourd’hui encore, l’aura de l’inconnu, tout ce que je projette sur lui sur la base du seul effet qu’il me fait, reste puissant. Objet de mes fantasmes solitaires, ultra présent dans mes histoires sous diverses formes, et recherché, inconsciemment ou pas, quand je sors en soirée fetish-bdsm. Jouer avec quelqu’un dont je ne connais rien, tâtonner, essayer ceci ou cela sur cette page vierge…
Beaucoup disent que les premières fois sont souvent ratées, car on ne se connaît pas encore, et que l’on s’améliore avec le temps. Certes. Mais il y a aussi des premières fois flamboyantes, libres, pleine de surprises, alors qu’ensuite, on cherchera à coller aux préférences de l’autre, à ses goûts, à faire valoir les nôtres, on se souciera de son opinion… Le champ des possibles se referme.
Vive les soirées, ce terrain de jeu des timides enfin libérés, qui apportent toujours leur lot d’inconnus et de nouveaux venus. Et dans ces soirées, les amis ne sont pas là pour juger ou porter un regard désapprobateur sur nos agissements, mais pour s’amuser autant que nous, si ce n’est plus !
Et vive l’écriture, qui permet de mettre en scène tous nos fantasmes, y compris les plus extrêmes, et les transcender, tranquillement installés devant un cahier ou un ordinateur (ou parfois déclamés devant tout le monde comme mardi dernier ^^).
Me confier à Flore m’a fait du bien, paradoxalement ! Nous ne devons pas avoir honte de nos fantasmes, de nos kinks, en être gênés… (crainte du jugement, du regard des autres, de ce qu’ils pensent de nous, etc…)
Parfois, imaginer nos fantasmes nous suffisent, nous ne ressentons pas le besoin de « passer à l’acte ».
Parfois, on se jette dans le grand bain, et tout droit dans la gueule du loup… et c’est jouissif, exaltant, de les assumer, de s’y adonner joyeusement, après des années à les enfouir honteusement – que de temps perdu (bon, tant que c’est légal, entre personnes consentantes ^^)
Écouter ces témoignages confiés sur ce podcast peut nous y aider, participer à des soirées aussi, en voyant à quel point les autres sont libérés du « qu’en dira-t-on »… pourquoi pas nous !