L’amour sans frontières

Cette histoire, c’est mon rêve d’enfant. Petite fille je ne pensais pas : « Un jour, mon prince viendra », mais plutôt « Un jour, mon alien viendra ! ». Il habite à l’autre bout de l’univers, il est très avancé technologiquement, et il vient sur terre exprès pour me voir, moi, car il a détecté mon envie de le rencontrer.  Un conte de fée des temps modernes : le blanc destrier est devenu un vaisseau spatial, la technologie remplace les objets magiques et les sortilèges… et « le prince charmant » ne se contente pas d’un doux baiser !

Après tout, pourquoi les aliens sont-ils le plus souvent hostiles, que ce soit dans les films ou les séries ? Je viens de regarder « Le problème à trois corps » sur Netflix, excellente histoire, mais qui me laisse sur ma faim. C’est toujours la même chose depuis « La guerre des mondes » : les aliens existent, et ils veulent nous exterminer (sorry pour le spoil).
Je pense qu’ils peuvent vouloir tout autre chose, arrêtons d’imaginer des aliens à notre image ^^

  

***


     C’est son premier festival, Louna vient tout juste d’avoir dix-huit ans. Elle aime tant la musique ! Deux ans déjà qu’elle trépigne, mais sa maman-poule s’est toujours montrée intraitable. Cette année, tout est différent, elle est enfin majeure, et elle a un petit ami à lunettes qui a réussi l’exploit de faire bonne impression. Sa mère s’est montrée conquise par son école d’ingénieur et, après mille recommandations, les a laissé partir avec leurs sacs à dos, le ventre noué par l’angoisse.
    La jeune fille respire enfin. Elle adore sa mère, mais elle a besoin de déployer ses ailes, de se frotter à l’inconnu, de vivre des aventures… Si sa mère savait ! Loïc avec ses allures de premier de la classe, c’est un fêtard de première, avide d’expériences en tous genres, une vraie tête brûlée qui a déjà bien bourlingué dans tous les festivals malgré ses vingt ans !

    Louna ouvre grand les yeux, émerveillée. Elle se retrouve au milieu d’une foule immense, entourée de musique assourdissante. Elle ne tarde pas à être prise par l’ambiance, elle se laisse emporter par le rythme, les mélodies, ivre de musique. Les DJ se succèdent sur scène, la foule tangue comme une mer agitée, communie. La canicule menace, c’est le seul danger de ces immenses rassemblements, la déshydratation. Les danseurs veillent les uns sur les autres. L’eau, la bière, le coca, coulent à flot, les bouteilles circulent de mains en mains. Ils s’aspergent, les teeshirt des filles sont trempés et ne cachent plus leurs poitrine, les garçons sont torses nus depuis longtemps. La tension érotique est palpable, même si tout le monde affecte de ne s’intéresser qu’à la musique. 

    Soudain, le ciel s’obscurcit, le soleil est masqué par une sorte de nuage noir. Louna frissonne ; on dirait qu’il va pleuvoir à verse. Elle s’extrait de la foule et se met à courir vers l’abri le plus proche, un hangar de ferme. Loïc ne l’a pas suivie, elle s’en étonne un instant, avant de l’oublier devant le spectacle du ciel. Elle ne quitte pas des yeux un nuage en particulier, il semble se rapprocher de plus en plus. C’est une sorte d’avion, un vaisseau spatial plutôt ! Extraterrestre, cela ne fait aucun doute. Louna ne s’inquiète pas, grâce à la bière sans doute… Elle ne pense même pas à s’enfuir ou se cacher, elle ne se sent pas en danger en fait, un peu comme lorsque l’on rêve. Elle le regarde atterrir, hypnotisée et fascinée, avant de le rejoindre, sans réfléchir, comme une somnambule.

    Le vaisseau s’est posé sans un bruit dans le champ juste en face, une silhouette humanoïde s’avance déjà à sa rencontre, un bras levé. En signe d’amitié peut-être ?
    Il se tient devant elle, beau comme le jour. Il irradie littéralement, il ressemble à… Timothée Chalamet… Par quel miracle !
    — Bonjour, je viens en paix, j’ai choisi cette apparence après avoir regardé vos émissions, je ne tiens pas à t’effrayer. C’est une illusion, nous sommes très différents sinon.
    Louna reste à sans voix. À quoi ressemble-t-il en réalité ? Un insecte ? Un lézard ? Il parle si bien le français… Les questions se bousculent sur ses lèvres. « Comment connais-tu notre langue ? D’où viens-tu exactement ? Pourquoi es-tu là ? Pourquoi suis-je la seule à avoir remarqué ton vaisseau ? Je veux te voir comme tu es, n’hésite pas, comme on dit chez nous : la beauté est intérieure ! »
    Timothée Chalamet sourit devant l’avalanche de questions. Comme tous les individus mâles de l’univers, il ne répond qu’à la dernière.
    — Tu es certaine de vouloir me voir ?
    — Oui.
    Une créature étrange remplace le jeune acteur, un être de grande taille, longiligne, souple, doté de nombreux membres souples se mouvant autour de lui comme des tentacules, de plusieurs yeux et bouches… La jeune fille pousse un cri, et l’être s’alarme.
    — Tu préfères Timothée Chalamet ?
    — Non, ça va aller ! Excuse-moi, je suis surprise, c’est tout ! Je peux te toucher ?
    — Oui, je suis venu pour cela, établir le contact !
Il lui tend quelques bras.
    Louna approche sa main, elle tremble un peu, mais la curiosité l’emporte tant elle est intriguée par sa peau lisse et brillante. Quelle douceur ! Elle n’a jamais touché une peau aussi douce de sa vie, même la sienne semble rugueuse à côté. Ses mains ne peuvent plus s’arrêter de caresser l’extraterrestre qui se tortille de plaisir. Il a l’air vraiment gentil, et Louna s’enhardit, elle a envie de l’apprivoiser, comme dans ce vieux film que lui a montré sa mère, E.T. Elle n’a pas de chocolat à lui proposer, mais elle ne manque pas d’idées.
    — Je peux t’embrasser aussi ?
    — Oui… je suis aussi venu pour… ça…
    L’alien change de couleurs, scintille, ses bras s’agitent, s’élancent, ondulent autour de la jeune fille. Ses multiples bouches déposent une pluie de baisers dans son cou, sur épaules. Ses longs bras la palpent, l’effleurent, l’enlacent. D’autres appendices mystérieux la touchent délicatement partout, exercent de délicieuses pressions, l’enrobent d’un cocon de douceur et de plaisir.
    Louna se sent en confiance, elle s’abandonne aux attouchements étranges de la créature, elle laisse son désir s’éveiller, l’envahir, elle s’ouvre, se laisse pénétrer. Elle n’a pas souvent fait l’amour encore, mais elle sait que ce qu’elle est en train de vivre n’a rien à voir avec les étreintes maladroites des garçons. Son plaisir monte à toute vitesse, avant d’exploser en une jouissance fulgurante. Louna rit de bonheur, son orgasme semble ne jamais se terminer, des vagues de plaisir se succèdent sans fin… son amant de l’espace lui offre le meilleur orgasme de sa vie, des sensations exceptionnelles, qu’elle pressant uniques au monde.
    Elle tombe amoureuse, éperdument ; peu importe ses bras multiples, sa peau colorée, sa souplesse élastique. Des ondes de plaisir pétillent dans tout son corps, jamais aucun homme ne pourra lui procurer autant de plaisir, elle en est certaine. Elle se blottit contre lui, heureuse, amusée par la mollesse de son corps dans lequel elle s’enfonce agréablement. 
    — Je dois repartir à présent, tiens, c’est pour toi !
    Bouleversée, Louna ne fait pas attention à ce qu’il glisse dans sa main, trop occupée à le retenir de toutes ses forces. Non, c’est impossible, il ne peut pas la laisser après lui avoir donné tant plaisir ! Il lui sourit de toutes ses bouches, et glisse hors de ses bras.

    La soucoupe s’envole sans bruit. Louna ne la quitte pas des yeux, elle scrute les cieux longtemps après qu’elle ait disparu avant de reprendre ses esprits. Loïc ! Ils ont convenu de se retrouver près du bar s’ils se perdaient.
Il est bien là, une bière à la main. Il n’a pas l’air inquiet, il l’accueille avec un grand sourire. Louna le questionne aussitôt, c’est plus fort qu’elle, tant pis si elle passe pour une folle.
    — Tu as vu le vaisseau spatial ?
    Loïc hausse les sourcils et Louna lui raconte ce qui s’est passé, omettant quelques détails. Loïc secoue la tête. 
    — On a dû glisser un truc dans ton coca à ton insu, ça ne doit pas être trop fort car je te trouve les idées claires, malgré tes… visions… ça s’est dissipé on dirait, mais fais attention à l’avenir, mieux vaut ne pas accepter une boisson d’un inconnu ! Oh, un DJ que j’adore vient de commencer son set ! On y va ? Tiens, bois de l’eau à nouveau, et il faut bouger pour éliminer ce que tu as pris… Tu me dis si ça ne va pas, d’accord ? Et met ta casquette ! Si ça se trouve, c’est une insolation !
    Louna le regarde, incrédule. Tout ce qui vient de se passer ne serait que le produit de son imagination ! Ce n’est pas possible… Elle sent un objet vibrer doucement dans sa main, elle se souvient tout à coup. L’alien lui a donné quelque chose juste avant de partir. Louna entrouvre ses doigts et découvre une pierre multicolore, lumineuse, douce et chaude comme une peau nue. Elle referme vivement sa main ; pourvu que Loïc n’ait rien vu ! Elle préfère garder le secret, il n’a pas eu l’air de la croire une seconde. Est-ce que c’est une sorte de bijou ? Un simple souvenir… ou un objet magique aux mystérieux pouvoirs… En tout cas, même si la pierre ne sert à rien, elle est vraiment belle avec ses couleurs chatoyantes.
    Tout le monde a de nouveau les yeux rivés sur la scène, le nouveau DJ enflamme la foule. Louna reste distante, elle ne réussit pas à se fondre dans l’ambiance, à revivre la transe des débuts du festival. Le charme est rompu, elle ne pense qu’à son extraterrestre. Personne ne fait attention à elle, elle observe discrètement sa pierre, la caresse, la porte ses lèvres pour l’embrasser… et s’évanouit.

    Elle tombe sans fin en tourbillonnant au milieu de mille particules explosives fusionnant les unes dans les autres avec des crépitements électriques et des rayonnements lumineux. La panique n’a pas le temps de la gagner, elle se retrouve bientôt chaudement calée dans les bras de l’alien. Nullement surpris, il la réconforte de son mieux, de toutes ses bouches et de multiples caresses.
    — Je suis ravi de te revoir ! Je voulais te parler de cette pierre, mais je n’ai pas eu le temps, j’ai dû partir précipitamment ! J’ai eu peur que tu ranges mon cadeau comme un vulgaire souvenir dans une boite et que tu l’oublies ! C’est un objet qui te permet de te téléporter directement dans mes bras à l’aller, et dans ton lit terrien au retour… Tu as de la chance, j’étais seul ! Il permet aussi d’échanger des messages, je te montrerai, ça peut être utile… Vous ne connaissez pas encore ça, vous autres terriens, voyager d’un bout à l’autre de l’espace sans bouger, en abolissant les distances grâce à l’infiniment petit ! Un jour, sûrement… en attendant, tu seras la première voyageuse à en profiter, mais tu as intérêt à garder le secret si tu ne veux pas qu’un laboratoire dissèque ta pierre et la brise à force d’expériences… Tiens, je t’ai préparé quelque chose pour éviter que tu la perdes ou qu’on te la prenne.
    Il enchâsse la pierre dans un pendentif, et elle devient un joli bijou fantaisie, presque anodin. Il noue la chaîne autour de son cou.
    — Voilà, grâce à ce support, ta pierre n’attirera pas l’attention, elle brille moins. Tu pourras la porter au vu de tous, sans la perdre, car tu ne pourras plus jamais l’enlever.
    Louna porte les mains à son cou. Elle sent à peine le poids du bijou, il fait partie d’elle à présent. Elle est heureuse de ce talisman, elle se sent bien, à l’abri.
    — Si on m’embête, je peux l’embrasser pour m’échapper ?
    Les multiples bouches émettent des gargouillis. 
    — Oui, bien sûr, mais j’espère que tu l’utiliseras surtout pour le plaisir de venir me voir ! Sinon, je reviendrai si tu m’oublies trop longtemps. Mais il est préférable que ce soit toi qui vienne, moi je ne peux pas rester longtemps sur ton monde, le temps y passe trop vite, c’est pour cette raison que j’ai dû partir précipitamment l’autre jour. Je m’étais attardé à cause de toi ! Mon vaisseau reste calé sur mon rythme, mais dès que j’en sors, c’est une autre histoire.
    — Comment ça, l’autre jour ? Tout à l’heure tu veux dire !
    — Pour moi, c’était il y a bien plus longtemps ! Nous appartenons à deux temporalités différentes et vivons à des années lumières l’un de l’autre… ce n’est pas un obstacle j’espère ?
Louna secoua la tête, et se blottit dans ses bras, se réjouissant de la texture de l’épiderme de son nouvel ami qui s’adapta aussitôt pour l’accueillir le plus confortablement possible. Un partenaire à mémoire de forme !
    — Au contraire ! J’ai envie de tout connaître de ta civilisation ! Tu sais, j’aime beaucoup la Science-fiction ! J’adore ça depuis toujours ! Surtout les aliens, et les autres planètes, tout ça… 
La créature gargouille de plus belle. 
    — Ce n’est pas de la SF, c’est ma réalité ! Je te montrerai tout, tu peux rester autant que tu veux, plusieurs heures ne représenteront que quelques secondes à l’échelle de ta planète. Vous subissez des influences différentes à cause de….
    Louna le coupe, elle ne veut pas d’un cours sur la relativité, pas maintenant.
    — Je vais rester plusieurs jours alors !
    Il la serre de tous ses bras, ravi de sentir son petit corps ferme de terrienne frémir dans ses longs bras. Il l’épluche de ses différentes peaux artificielles pour atteindre celle qui est tiède, moite, duveteuse, et qui vibre si bien à son contact.
Jamais Louna ne s’est sentie aussi bien, elle sait la jouissance dévastatrice qui l’attend. Les multiples bras de son alien sont comme des lianes qui l’entourent, la serrent délicieusement, ses bouches l’embrassent partout à la fois, ses sexes serpentent déjà entre ses jambes… Un jour elle lui demandera peut-être Timothée Chalaumet à nouveau, mais pour l’instant, elle raffole de sa peau douce et fraîche qui se marie si bien à la sienne, et s’abandonne à ses tentacules.

    Photo : film Upside down

2 commentaires

  1. Marie Canadas a écrit :

    J’adore !!

    1. a écrit :

      Merci ! 🙂

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