Knife play

Dans ma série de textes sur les pratiques bdsm, voici une histoire avec du knife play (manier une lame de couteau sur la peau d’un soumis ou d’une soumise). Une pratique cérébrale qui joue sur la peur, l’appréhension, et qui offre des ressentis sensuels ou douloureux, selon l’intensité et les souhaits des partenaires de jeux.

***

Ils se connaissent depuis longtemps, ils se croisent souvent en soirée. Ils ont déjà joué un peu ensemble, tout en dansant. Il est le seul dominant dont elle ose s’approcher ! Son sourire malicieux, sa bienveillance, son look de viking… Cette fois, ils sont dans une soirée consacrée au bdsm, sans dance-floor, et se retrouvent par hasard accoudés au bar. Elle se sent troublée, elle devine qu’ils pourraient aller plus loin ce soir, peut-être. Il lui sourit.
— Je me souviens que tu aimes être étranglée, étouffée, griffée… quoi d’autre ?
Elle rougit ; il l’a bien cernée déjà ! Ils discutent de ses goûts, de ses limites… Elle le sent attentionné, protecteur, désireux de lui faire plaisir, joueur. Elle a envie de jouer elle aussi !

Il l’entraîne dans la pièce la plus cachée du club. Il lui parle de sa dernière découverte, le knife play, et lui montre un couteau. Il le fait miroiter à la lumière et la rassure.
— J’ai émoussé la lame, c’est sans danger, ce qui n’empêche pas d’avoir peur. Tu aimes avoir peur ?
Pas vraiment… mais avec lui, elle est d’accord pour tout essayer, ce qui lui plaît lui plaît aussi ! Oui, elle veut bien qu’il lui fasse peur, car c’est lui, elle ne voudrait avec personne d’autre.
Il poursuit sa présentation du jeu.
— On peut caresser la peau de la lame, ça fait comme des griffures, piquer avec la pointe, ou appuyer avec le côté tranchant, jusqu’au sang… mais ce n’est pas trop mon truc, en tout cas, pas en soirée.
Elle ne veut pas aller jusqu’au sang non plus, mais cela l’excite qu’il l’évoque, et même l’envisage en dehors des soirées. Rien que ce mot : sang, et l’eau lui vient à la bouche – son côté vampire. Mais il se fait fort de lui changer les idées :
— Est-ce que cela te convient si la séance prend un tour plus sexuel ?
Nouvelle flambée de désir, elle opine avec enthousiasme. Elle le désire depuis si longtemps !
Il sourit, il devine sa joie et s’empresse de préciser.
— C’est juste une éventualité, rien d’obligatoire, nous verrons bien où la séance nous mène. Je préfère tout envisager au début, pour me laisser porter ensuite, et bien sûr, tu as ton safe word, pour arrêter à tout moment.
Elle sent son attention constante, il veille sur elle, avec bienveillance. Il va retenir ses gestes pour elle, pour lui faire plaisir, quitte à s’ennuyer en oubliant son côté sadique.

— Je vais commencer par t’encorder.
Il se tait, l’heure n’est plus aux échanges. Il dénoue ses cordes rouges tandis qu’elle se déshabille ; elle a toujours préféré le contact des cordes sur sa peau nue, avec les doigts du shibariste qui l’effleurent.
Elle s’assoit en tailleur devant lui, et s’efforce de lâcher prise. Elle ferme les yeux pour ne plus se laisser distraire par son allure si sexy, et éviter d’être submergée de fantasmes qui n’ont rien à faire là. Il l’aide en lui bandant les yeux, et elle bascule dans une autre dimension. Elle l’entend respirer, dérouler la corde, avant qu’il ne l’applique sur sa peau, l’enferme et l’emprisonne peu à peu. Délicieuses sensations contradictoires, le plaisir d’être contrainte, impuissante. Il ne cherche pas à lui faire mal, il desserre les cordes au besoin, les appose au ralenti. Elle sent le picotement du chanvre, ses doigts chauds qui la chatouille en s’activant sur les nœuds…
Il a terminé le harnais et lie ses jambes à présent. Elle est à sa merci, incapable du moindre mouvement, il doit la soutenir et l’aider pour qu’elle puisse s’allonger sur le ventre, la tête au creux de ses bras repliés sur sa poitrine et encordés.
Elle s’abandonne, ravie de n’être plus qu’un jouet entre ses mains, heureuse de ce long moment ensemble, au lieu des quelques instants qu’ils s’accordent parfois tout en dansant. Elle est complètement immobilisée à présent, elle attend la suite en frémissant, inquiète et rieuse à la fois. Elle tente une plaisanterie, l’interpelle, mais il reste muet, posant simplement une main apaisante sur son épaule. Elle réprime un petit cri quand la pointe du couteau effleure son dos. Ce piquant glacé ! Son corps est parcouru de frissons tandis qu’il promène la lame froide du couteau sur sa peau. Elle ose à peine respirer, elle goûte ce plaisir inédit, de délicieuses sensations, entre chatouilles, griffures, et caresses… Surtout ne pas se tendre ni se crisper, ce n’est pas agréable quand on se trouve entravée. Accueillir les sensations, en profiter pleinement, frissonner, rire… Elle n’a plus peur, elle voue une confiance aveugle à son doux tortionnaire. La lame d’acier évolue lentement sur sa peau, glisse entre les cordes, s’enfonce ça et là, s’attarde un instant dans son cou. Sa vie ne tient plus qu’à un fil et ce danger imminent l’enivre et lui coupe le souffle. Un danger mis en scène, elle sait bien qu’il ne fera jamais rien pour lui nuire. C’est égal, dans son monde fantasmatique, le risque est bien réel, excitant et exaltant. Elle n’aime pas avoir peur, mais elle aime remettre sa vie entre ses mains. Elle lui appartient, il peut faire tout ce qu’il veut d’elle, et même lui ôter la vie, elle lui en a donné le pouvoir. Mais il a d’autres envies.
— Je sais que tu n’aimes pas trop l’impact, mais tes petites fesses sont très tentantes… je pourrais les enfermer toutes entières dans mes mains ! fait-il en les frôlant.
Elle se récrie : si si, elle aime bien ça ! Avec lui, elle veut bien être fessée.. rien que le mot l’émoustille ! Cette pratique d’autrefois pour les enfants turbulents, légèrement humiliante, si excitante quand c’est dosé avec art. Il la fesse légèrement, et puis de façon plus appuyée, avec la pression et la force idéale pour ses fesses douillettes. Elle se mord la main pour ne pas gémir, de plus en plus excitée. Ils sont connectés, en phase, tandis qu’il la fesse en douceur, l’échauffant sans la meurtrir. Il lui avoue son désir, ses petites fesses le rendent fou. Elle reste muette, folle de désir aussi, et paralysée par le trac. Elle est à lui, il n’a qu’à ordonner et elle fera tout ce qu’il veut… Des images jaillissent dans ses pensées, son cœur bat la chamade.
Il délie les liens de ses jambes, la redresse, et l’assoit devant lui.
— J’ai envie que tu me suces.
Rarement ordre ne fut aussi promptement exécuté ! Elle s’approche de lui au ralenti, en équilibre instable sans l’usage de ses mains. Il prend sa tête entre ses mains, à la fois pour la maintenir et l’attirer, la forçant à se pencher. Il tire ses cheveux, à peine, un infime inconfort supplémentaire. Elle soupire d’aise, elle ne veut pas souffrir, mais se sentir à lui, prise en main, et se consacrer totalement à lui.
Elle avale son sexe avec délectation ; il lui plaît tant. Elle pourrait le sucer des heures, oublieuse de tout, sauf de lui faire plaisir. Elle lèche le bout de son sexe, l’enfourne tout entier, promène sa langue partout… Le sien se contracte de désir, pulse, dans l’attente et l’espérance d’être comblé, ce qui n’est pas certain. Il restera frustré peut-être, et cette frustration est délectable aussi. Elle s’enflamme, se complaît dans son rôle de soumise qui s’oublie, entièrement tournée vers le plaisir de son maître. Une abnégation qui a ses limites, tant elle le veut ! Elle s’efforce de le rentre dingue de désir, qu’il la veuille lui aussi ! Son cœur bondit de joie en l’entendant :
— Et maintenant, je voudrais te prendre.
Il l’allonge, ouvre ses jambes et la pénètre sans attendre, à peine le préservatif mis. Elle gémit de bonheur, elle en rêvait depuis si longtemps, depuis le premier jour où elle l’a rencontré ! L’heure n’est plus au bdsm, mais aux étreintes tendres et torrides. Il dénoue à demi son corset de cordes, libère ses seins, les empoigne, les mordille, en la baisant toujours.
Quelques pensées parasites menacent de la distraire : et si on les surprenait ? Elle tâche de faire abstraction des voyeurs imaginés – amis, curieux, amateurs de bdsm choqués par ces activités libertines peu en accord avec le thème de la soirée… Mais pourquoi avoir des scrupules, c’est une soirée libre, chacun peut s’adonner à ses kinks et ses pratiques préférées sans jugement ! Bientôt, elle oublie tout pour de bon, à l’abri dans sa bulle, invisible, dans un lieu où le temps et l’espace n’existent plus, un monde de ressentis et d’émotions pures.
Il use d’elle à sa guise, la fait voltiger entre ses bras. Elle s’offre avec bonheur, ivre de se donner, de lui faire plaisir, un plaisir qui déclenche le sien. Ses halètements, son souffle court, ses grognements l’excitent et elle remue de plus belle sous son corps lourd. Qu’il la prenne fort, plus fort, longtemps, sans se soucier d’elle ! Elle prendra son plaisir en marge, un plaisir double, lié à celui de son amant en plus du sien, car tel est le miracle de l’empathie, ce don du ciel – et cette malédiction parfois – qui lui fait tout ressentir deux fois ! Une télépathie des sens et des émotions qui lui reviennent en boomerang et s’ajoutent aux siennes, un cocktail explosif et excitant, proche de la jouissance. Une jouissance qui lui échappe, elle reste sur le qui vive, mais l’orgasme de son amant la propulse au 7e ciel elle aussi. Ses pensées s’affolent, portées à ébullition, elle s’envole, jouit en pensée. Des ondes de plaisir se propagent tout son corps, son sexe se contracte, sur le point de jouir lui aussi.

Ils s’abattent sur lit, rompus de fatigue. Le visage de son maître d’un soir est détendu, souriant. Il n’a plus rien d’un maître en fait, c’est son amant qui la câline, la couvre de mots doux. L’after care, c’est valable pour les amants aussi ! Elle ne parvient pas à parler, elle se blottit contre son torse luisant de sueur, collée à lui pour toujours — enfin, jusqu’à ce que la soirée la rappelle, d’autres jeux l’attendent, et lui doit rentrer. Ils s’étreignent une dernière fois, réjouis et complices. Le souvenir de ce moment flambera dans leurs pensées à chaque fois qu’ils se recroiseront… Ils recommenceront, qui sait, et cette fois, elle lui demandera un souvenir gravé dans sa chair, une cicatrice cachée.

– photo : film Dune

 

12 commentaires

  1. Mick_lars a écrit :

    L’intitulé de la pratique pouvait effrayer, mais l’étreinte évoqué rend le texte terriblement excitante. Quel talent dans l’écriture sensuelle, sexuelle même mais jamais vulgaire

    1. a écrit :

      Merci beaucoup ! 🙂

  2. BILLET a écrit :

    Quel plaisir de vous lire et de sentir le grand frisson ! On attend la suite avec impatience.

    1. a écrit :

      Merci ! Ravie de vous donner des frissons 🙂

  3. Sylvain a écrit :

    Quelle magnifique feu allumé par ces préliminaires BDSM. Une montée dans le désir au sommet des orgasmes. Votre plume est vraiment formidable!!

    1. a écrit :

      Merci pour ces compliments ! 🙂

  4. Pouilhe a écrit :

    Bonjour Clarissa,
    Première lecture pour moi et une découverte émouvante et émoustillante.
    J’aime.
    Jean-Michel.

    1. a écrit :

      J’en suis ravie, merci !

  5. Lastapis a écrit :

    Ça sent le vécu Clarissa

    1. a écrit :

      Il y a du vrai et du faux mélangés !

  6. Olivier a écrit :

    Ai pris un immense plaisir, a lire se dernier post, m’imaginer un voyeur imaginaire.
    Merci 😘

    1. a écrit :

      Merci ! 🙂 Très contente d’avoir entrouvert ce voile pudique 😉

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