Je connaissais déjà le pouvoir des jeux, quels qu’ils soient,
Jouer aux jeux de rôles, à Donjons et Dragons précisément, partir en quête avec un beau paladin, ne plus le quitter d’une semelle, profiter de son épée toujours prête à jaillir de son fourreau pour me défendre. Finir par confondre le jeu et la réalité, tomber amoureuse du personnage, et puis du joueur.
Jouer les dominatrices en soirée, s’amuser avec un soumis de passage, comme ça, pour voir… se prendre au jeu, devenir dominatrice de soirée pour de bon, garder le soumis en question, il fait parfaitement l’affaire !
Je réalise à présent le pouvoir des mots…
Quand j’écris, j’utilise souvent des anecdotes de ma vie quotidienne, je les déforme, les embellis, les enrichis au gré de mes fantasmes. Les personnages, eux, sont le plus souvent imaginaires, ce qui me permet de leur faire faire des folies sans état d’âme. Cela me crée quelque difficultés : j’oublie si telle fille est fine ou ronde, blonde ou brune ; l’homme velu, dodu ou mince – je suis trop négligeante pour faire les fameuses « fiches de personnages ». Et puis, ce n’est pas la peine pour des nouvelles quand on les écrit d’une traite. Pour des textes plus longs par contre, les choses se corsent, on ne peut plus seulement compter sur sa mémoire, surtout quand on reprend un texte en cours après plusieurs semaines d’abandon !
Cette fois, par paresse, j’ai choisi quelqu’un que je connais pour incarner l’un de mes personnages. Quelle bonne idée, ce sera plus cool pour décrire son caractère, ses traits, son corps… Pas besoin d’inventer, de me souvenir de ce que j’ai imaginé, je n’avais qu’à invoquer l’image de mon ami !
J’ai pu mesurer le pouvoir de l’écriture, un pouvoir magique, car l’écriture influence la réalité. Mon regard sur lui a changé, je ne vois plus l’ami, mais le héros de mon histoire, mon attitude vis-à-vis de lui n’est plus la même. Quand je le croise, je rougis comme mon héroïne, je pense à ce qu’il lui fait dans mon histoire et je me trouble. Il devient difficile de le regarder en face et d’agir normalement, j’ai envie de fuir à l’autre bout de la pièce dès qu’il m’adresse la parole.
Je deviens mon héroïne, elle s’incarne en moi, j’épouse ses pensées, ses scrupules. Des désirs, des sentiments naissent malgré moi, mon personnage me possède, s’invite dans mon cœur, prend toute la place. J’ai les mêmes envies qu’elle, je suis devenue elle. Je voudrais écrire la suite de l’histoire dans la vraie vie cette fois, à la première personne du singulier.
Que faire : le fuir, ne plus le revoir…. lui envoyer ces aveux ?
Je pensais écrire une histoire, j’ai lancé un puissant sortilège, aux conséquences dévastatrices.
Photo : Sara Gray
5 commentaires
Très joliment raconté et fort juste, Clarissa, comme tous vos écrits, que je découvre récemment et dont je suis fan Il n’y a pas de hasard dans le choix de cet ami pour incarner un de vos personnages. Cela m’est arrivé également, je comprends votre trouble, et ce va-et-vient entre fantasme et réalité. Enjoy! Tibo
Je suis bien contente que mes écrits vous plaisent ! Merci pour ce retour… oui, effectivement, pourquoi avoir choisi précisément cet ami là… Notre inconscient nous joue des tours !
…. ou pas (pour le retournenemt) !
Merci Bleue pour ton joli commentaire ! Il me rappelle une citation vue sur Facebook « je suis écrivaine, tout ce que vous faites peut se retrouver dans un livre », ou quelque chose comme ça ! Mais ça se retourne contre nous !
C’est en effet du plus agréable d’écrire de cette manière, Clarissa… il y a autour de nous tant de personnes qui peuvent, sans le savoir, se transformer en « nos » héros et héroïnes. Et cette sensation de… et que cela fasse rougir, je la connais si bien ! Bonne continuation et au plaisir de te lire encore. Bisous.