Cluedo érotique – Chap.5 Fin de partie

La fête bat son plein, mais minuit sonne la fin du jeu… normalement !

Dans la salle à manger, le docteur Lenoir avec le révolver

Tous se rassemblèrent à minuit dans la salle à manger, comme convenu.
— Tiens, vous avez réussi à vous délivrer ? glissa perfidement madame Pervenche à l’oreille du révérend.
— Heureusement pour moi, le docteur Lenoir patrouillait dans le manoir pour s’assurer que tout se passe bien, il s’est empressé de me libérer. On ne laisse jamais un soumis seul encordé, il a dit !
Madame Pervenche ricana.
— Vous aviez les jambes libres, vous pouviez toujours vous lever et demander de l’aide, au lieu d’attendre comme un benêt !
Blanchette circulait entre les joueurs et leur proposait des petits canapés, des mini sandwichs ; ça creuse de jouer.
— Tiens, le révolver a disparu, s’exclama-t-elle en jetant un coup d’œil sur la table. Il se trouvait à côté de la clef anglaise, toujours présente, elle.
— C’est normal, puisque c’est l’accessoire que j’ai choisi, fit une voix d’outre-tombe. Révérend, vous avez commis une lourde erreur en dédaignant cette arme.
Le docteur Lenoir ! Il les visait de son arme, l’air menaçant.
— On est toujours dans le jeu de rôles, là ? chuchota mademoiselle Rose à madame Pervenche.
— Aucune idée ! Si ça tourne vinaigre, on pourra toujours prononcer notre safeword… S’il fonctionne, c’est qu’on est toujours dans le jeu ! Rassurez-vous mon petit, j’ai de la ressource pour nous défendre…
— Il est minuit, l’heure du crime, et c’est la fin de notre jeu de rôles, proclama le docteur Lenoir. Mais j’ai envie de jouer encore, vous êtes loin d’avoir exploré toutes les pièces du manoir, ni exploité toutes les possibilités des accessoires et des combinaisons entre vous… Je suis très déçu en particulier que la salle de billard n’ait inspiré personne… Petits joueurs ! Malgré tout, je salue votre imagination et votre énergie, et vous annonce que vous avez réussi votre passage au niveau 2, félicitations ! Bienvenue dans mon Cluedo XXL, et surtout X d’ailleurs, ah ah.
— Alors, qui a gagné ? l’interpella le colonel.
Le docteur Lenoir fut pris de court. C’était vraiment la première fois qu’un joueur insistait pour qu’il annonce un gagnant ! Il n’avait pas tant observé les ébats que veillé à ce que tout se déroule sans anicroche. Il avait dû libérer le révérend solidement encordé et qui bêlait comme une âme en peine dans le bureau, soigné Blanchette que ce maladroit de colonel avait coupé avec son poignard, écouté les jérémiades du professeur Violet désœuvré, au début du moins… Sa réponse fusa toute seule.
— Blanchette ! Pour son implication dans le jeu de rôles et son énergie sexuelle communicative !
Blanchette lui sauta au cou, pour le plus grand plaisir du docteur sembla-t-il.
Tous l’applaudirent vivement, l’embrassèrent, la chatouillèrent… Les choses menaçaient de dégénérer, le docteur leva les mains pour faire cesser les ovations.
— Et maintenant, suivez-moi, ordonna-t-il en agitant son révolver.
Peu rassurés, les convives lui emboitèrent le pas en échangeant des regards inquiets. Quelques uns serraient dans leur main leur arme, qu’ils avaient omis de remettre sur la table – bien leur en a pris, le docteur Lenoir semblait étrangement exalté. Et c’était quoi cette histoire de niveau 2 ? Ce n’était pas prévu, ni indiqué sur le site de réservation…
De la musique leur parvint ; ils retournaient dans la salle de bal.

Dans la salle de bal

— J’ai organisé une petite sauterie en votre honneur, pour cette édition spéciale « fêtes de fin d’année » ! J’espère que vous ne me ferez pas faux bond ?
Le pistolet s’agita nerveusement, menaçant.
La petite troupe contemplait la salle de bal, serrés frileusement les uns contre les autres. Ils échangèrent des regards, interloqués : une centaine de personnes dansaient, et en y regardant de plus près, on distinguait d’autres mademoiselle Rose, des colonels, des révérends… Toute l’équipe en plusieurs exemplaires ! Il y avait aussi des personnages inconnus, issus probablement de versions alternatives du jeu.
Le docteur Lenoir rangea enfin son arme à sa ceinture et s’expliqua.
— Je vous dois des excuses pour ma petite mise en scène dramatique, si jamais je vous ai effrayé. Je n’ai pu résister, en voyant le révolver inutilisé, une fois de plus. Mais puisqu’aucun d’entre vous n’a dit Cluedo, j’en ai déduit que vous vouliez jouer encore ! J’ai réuni tous les joueurs des précédentes éditions pour un final en apothéose… Il faudra que je loue un château si je renouvelle l’expérience, la salle de bal ne suffira plus à tous vous accueillir… Je vous invite à vous réunir par type de personnages afin d’échanger vos expériences, faire connaissance et rebattre les cartes. Les personnages rares, allez où bon vous semble !

Dans l’équipe des madames Blanche, Blanchette repéra deux Sissys, ces hommes aimant se travestir en soubrette. Elle eut tout de suite envie de jouer avec elles, de leur tirer les couettes, fussent-elles fausses, et de soulever leur robe, pour vérifier ce qui se cache dessous… Les langues se déliaient : quels amants et amantes avaient-elles choisi, quels objets ? Toutes n’avaient pas opté pour le chandelier, loin de là, elles furent nombreuses à choisir le couteau et se réfugier en cuisine.
— J’ai fait des estafilades à tout le monde, fanfaronna l’une d’elles. Il y avait la queue à la véranda pour les soins ! Le docteur a fini par se fâcher, il m’a donné une petite fessée.
Blanchette ne put réprimer un mouvement de jalousie ; elle n’avait pas eu droit à la fessée, elle, et pourtant, elle n’avait pas ménagé ses efforts pour le provoquer.
D’autres professeurs Violet se révélèrent bien plus dominants que le leur. L’un se vanta d’avoir attaché dos à dos mademoiselle Rose et madame Pervenche, un autre d’avoir organisé un gang bang pour leur madame Blanche, particulièrement coquine…
— Moi j’ai surtout joué dans la salle de billard, avec les boules et les queues, si vous voyez ce que je veux dire, triompha un gros colonel.
— Ce n’était même pas dans le choix des armes, donc ça ne compte pas, persifla une demoiselle Rose qui tenait au respect des règles – à quoi bon jouer, sinon ?
Les conversations allaient bon train, et une question revenait sur toutes les lèvres : avez-vous réussi à jouer avec la clef anglaise ?
Un révérend Olive, pas peu fier, raconta qu’il l’avait posée sur le dos de leur madame Pervenche. Le froid glacial du métal sur sa peau brûlante avait fait des merveilles !

Le docteur Lenoir tapa dans ses mains pour attirer leur attention.
— Je vous invite à refaire un tour dans la salle à manger, la table s’est enrichie d’un nombre considérable d’accessoires, et désormais vous pouvez explorer le premier étage…
— Les chambres, supposa une mademoiselle Rose inconnue, ce sera quand même plus confortable que la table de billard ou le canapé du salon !
— Le canapé a son charme, fit madame Pervenche, énigmatique.
— … et aussi les sous-sols du manoir, poursuivit le docteur, dont les aménagements devraient particulièrement plaire à certains et certaines d’entre vous.
Il fit un clin d’œil à la dernière madame Pervenche qui frémit d’impatience. Un donjon sûrement ! Elle se mit en route aussitôt, avec un petit détour par la salle à manger pour s’emparer de martinets et de cravaches avant les autres. Un professeur inconnu tombé sous son charme la suivit aussitôt comme un toutou. Inspirée, elle lui mit un collier et une laisse, également à la disposition sur la table.
La plupart des demoiselles Rose voulaient danser avant de se mélanger. Et puis, elles étaient si bien là, entre filles, se tenant bras dessus bras dessous, leurs poitrines collées les unes contre les autres… On n’avait pas besoin d’hommes puisqu’on avait la matraque ! Elles riaient, émoustillées et unies, s’embrassaient, emmêlaient leurs langues. Mais leur groupe ne tarda pas à se disloquer malgré leurs tendres promesses ; l’une ne put résister à un colonel forçant leurs rangs, une autre à un révérend cherchant à la confesser. Elle s’agenouilla aussitôt, baisant la sainte croix pendouillant très bas, pile au bon endroit.

Bientôt l’orgie fut générale, la plupart des pièces occupées, les objets utilisés et détournés lors d’intenses ébats à deux, à trois, et plus encore.
Le docteur Lenoir se frotta les mains ; il pouvait enfin penser à lui ! Il allait se mettre en quête de sa chouchoute, la dernière madame Blanche, Blanchette. Il avait un cadeau à lui remettre, en toute discrétion – sinon, les joueurs des éditions précédentes allaient réclamer un gagnant et un cadeau eux aussi. Blanchette était trop craquante, il adorait son côté frais et soumis à la fois, et son ardeur à se couler dans son rôle. Enfin, soumise, c’était vite dit, elle menait les hommes par le bout de son nez mignon ! Après réflexion, il choisit des menottes et un bandeau pour les yeux, afin d’apprivoiser ce feu follet, et se lança à sa recherche.

The End

 

– Photo : film Gatsby le magnifique

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

À propos de l’auteur

Blogueuse et autrice