Amours fluorescentes

Une histoire inspirée des stands de body-painting présents parfois en soirée (récemment aux soirées Hell’O Kinky, Hellektro..). Des arabesques fluorescentes sont dessinées sur les corps et les visages des participants, et des lumières noires les transforment en œuvres d’art vivantes. Féérique et psychédélique !

***

   Célia prend Yvan par la main et fend la foule en direction de l’espace de jeux aménagé derrière la piste de danse. Coup de chance, un lit situé à l’écart est libre, et Célia s’y jette aussitôt pour se l’approprier, même si c’est sans doute un peu trop rapide pour Yvan.
   — C’est rare de trouver un lit, se justifie-t-elle un peu honteuse, j’ai préféré nous le réserver sans attendre !
   Yvan ne semble plus timide tout à coup, il s’allonge de tout son long. Célia enlève sa robe, frémissante d’impatience, et, à la réflexion, son soutien-gorge aussi — les fines dentelles risquent de ne pas trop aimer non plus la peinture fluo.
   — Oh, tu es tellement belle !
   Célia remercie en silence l’obscurité ambiante qui masque ses défauts. Elle ne voit que les peintures animées sur la peau de Yvan, comme des hallucinations…
   Yvan l’attire à lui, referme ses bras sur son dos, et dès lors, il n’est plus question d’initiation bdsm, mais d’étreintes, d’enlacements, de baisers… Leurs corps se réchauffent, deviennent moites, glissent l’un sur l’autre. Célia cherche sur le corps de Yvan les endroits oubliés par le peintre, le cou, les flancs… elle l’embrasse là, et là, lèche sa peau salée, se régalant de son goût iodé d’océan ; elle boit la tasse ! Yvan se tortille, chatouillé, ça ne se fait pas les bisous sur les flancs ! Il la serre contre elle et la maintient prisonnière, ignorant ses protestations rieuses ; la robe est enlevée, alors elle n’a plus rien à craindre, non ? Célia se rend, s’offre à cet homme peinturluré qui la maintient contre lui d’une main de fer. Ses couleurs se transfèrent sur sa peau, elles se mélangent, se fondent, Célia n’en a cure. Il pourrait être couvert de boue, elle le voudrait quand même ! Elle le veut, elle le veut, de toutes ses forces, maintenant !

   Quand ils se relèvent, bien plus tard, ils se regardent avec étonnement, un rire au bord des lèvres. Quelle folie les a pris ! Les peintures du corps de Yvan ont quasiment toutes disparues, il ne reste que quelques tâches sur son visage, et un peu de couleurs brouillées sur son corps. Apparemment, Célia n’a presque pas de traces de peinture non plus, c’est étrange. C’est comme si leurs peaux l’avait absorbée pendant qu’ils s’étreignaient passionnément. Célia pense une nouvelle fois à sa robe, elle s’essuie soigneusement au cas où, avec du sopalin mis gracieusement à disposition par les organisateurs. Elle prend Yvan par la main, et, le cœur un peu serré, se prépare à le libérer. Elle a aimé l’accueillir, lui ouvrir ses bras, mais à présent, il doit profiter de la soirée, faire d’autres rencontres, vivre des aventures – beau comme il l’est, cela ne devrait pas tarder. Il la serre contre lui, fort, la remercie.
     — Je me souviendrai toute ma vie de ce moment, on se souvient toujours de nos premières fois !
   Ils se promènent main dans la main dans l’espace câlins, observent les scènes qui se déroulent sous leurs yeux : des couples et des trios s’ébattent, des femmes sont assises, jambes bien écartées pendant qu’un homme les lèchent, des hommes appuyés contre le mur sont sucés par d’ardentes jeunes femmes et retiennent difficilement leur plaisir…  Tout un concert de gémissements s’élève, et menace de couvrir le son techno qui s’échappe du dance floor.
   Sur le lit principal, un gang bang improvisé s’organise. Une jeune femme est agenouillée au milieu d’un cercle d’hommes, elle les suce à la chaîne ou les caresse. Elle se met à quatre pattes, et les invite d’un sourire à la prendre. Ils ne se font pas prier, il se succèdent en elle en un ballet empressé. La jeune femme reste aux aguets ; ils ne sont pas assez nombreux encore, elle veut être submergée d’attentions, de caresses, de baisers… Elle remarque Yvan et lui fait signe d’approcher. Il n’ose pas, Célia le pousse gentiment.
   — Elle t’appelle, ne la déçois pas ! Elle est belle n’est-ce pas ? Ne sois pas timide, tu vas le regretter…
   Yvan s’approche de l’inconnue comme un automate.
   — Baisse ton boxer !
   Elle engloutit son sexe dans sa bouche avec gourmandise sans parlementer plus longtemps. Le voilà sucé au rythme des coups de reins des amants qui se relaient toujours derrière elle.
   Yvan ferme les yeux ; il vient de jouir de la façon la plus romantique qui soit dans les bras de Célia, en la couvrant de baisers et de mots doux, et il ne va pas tarder à jouir à nouveau, avalé par cette tigresse insatiable.
   Célia préfère sortir de la pièce, elle n’a pas envie d’assister à la suite maintenant qu’elle a relâché Yvan et qu’il est déjà « en mains ». Elle croise des amis, ils la taquinent, pointent du doigt un peu de peinture fluo sur son front, dans son cou… Célia s’enfuit en riant et se mêle à la foule des danseurs. Elle s’attarde un moment sur la piste de danse, mais le cœur n’y est plus, il lui semble qu’elle ne pourra rien vivre de meilleur dans cette soirée, elle préfère entretenir le souvenir de son amant aux mille couleurs. Il est déjà tard en plus, elle quitte la soirée le cœur en fête, libre, bien vivante. La soirée bat toujours son plein, mais elle s’en va sans se retourner, accompagnée par la musique techno qui s’amenuise à mesure qu’elle s’enfonce dans le silence de la nuit.

***

   L’histoire est inventée, mais l’anecdote de départ est vraie : j’ai bien une robe wetlook avec des traces de peintures fluo qui ne sont jamais parties au lavage ; je me méfie depuis !

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   Première image prise sur le net (je vois souvent passer de belles photos prises en soirée, mais je n’ai pas osé en choisir une), créditée ou retirée sur simple demande.

   Selfie raté, souvenir d’une soirée de juillet 2022 – dommage, je n’étais pas sous une lumière noire.

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