A la plage

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    Une carte postale au milieu de mes vacances, pour vous confier quelques pensées secrêtes…

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     La plage constitue une scène de théâtre idéale pour une écrivaine érotique. Pendant que les uns et les autres s’adonnent à leurs activités préférées (sauts dans les vagues, pâtés de sable, lecture du journal… ), je m’installe à l’ombre d’un parasol et me livre à la mienne.

     A demi cachée par de grandes lunettes de soleil et une immense capeline, je me tourne vers la mer et me repais du spectacle qui défile sous mes yeux. Tous ces corps exposés, presque nus, déambulant ou alanguis, il n’y a donc que moi qui m’en étonne et m’en réjouisse ? Tout le monde semble trouver cela naturel de se dénuder ainsi et de s’allonger si près les uns des autres… Moi j’y vois une invitation, une incitation à la plus grande fête des sens qui soit, en pleine lumière, en pleine chaleur, entre des centaines d’inconnus. Une orgie joyeuse, insouciante, libérée, est sur le point de se déclencher à tout moment et je retiens mon souffle, tendue dans l’attente. Je regarde fascinée ces corps se mouvoir, courir, marcher, s’enduire de crème, plonger dans l’océan… Ils deviennent des œuvres d’art, des statues. Certains sont si parfaits qu’ils sont presque douloureux à regarder, d’autres, plus appétissants évoquent le bon vivant… Ils sont jeunes et fermes, dodus, ou un peu avachis, toujours émouvants… ils arborent des peaux carbonisées au soleil ou blanches comme un premier jour de vacances.. ils me plaisent tous !

     Je n’ignore pas les femmes qui se présentent sous mes yeux, et ô délices suprêmes, il me semble que la mode du topless tente un timide retour ! Je ne reste pas insensible, je l’avoue, en apercevant du coin de l’œil, sans oser les fixer, ces poitrines libres, généreuses ou menues… j’imagine sans peine dans quel état se trouvent les hommes aux alentours même s’ils jouent les indifférents et les blasés ;-).

      Des histoires naissent toutes seules, se développent et disparaissent dans l’instant. Des histoires de plages désertes, de naufrages et de pirates ténébreux et violeurs, des histoires de feux de camp sur la plage qui dégénèrent joyeusement, des histoires de plages naturistes où je rêve d’aller et qui me sont pour l’instant interdites….

     Ivre de chaleur, la tête lourde des fantasmes et visions qui se bousculent, je me lève, et pénètre centimètre par centimètre dans l’eau glacée. Je dois me forcer à continuer, je suis si bien toute chaude… je me concentre sur le bien être qui ne va pas manquer de suivre ces frissons, et poursuis mon entrée. Je comprends alors parfaitement le plaisir trouvé dans la souffrance au fil des délices et tourments de l’eau froide sur mon corps brûlant. Le supplice atteint son paroxysme quand les vaguelettes parviennent jusqu’à mon ventre. J’ai beau me hisser le plus possible sur la pointe des pieds, une vague traîtresse finit par me toucher et me torturer.. Je pousse des petits cris de surprise et de plaisir, et l’on me regarde avec amusement. Enfin plongée dans la mer jusqu’au cou, je respire, m’habitue à la fraîcheur, et jouis enfin de la baignade. Je fends l’onde avec grâce, mes longs cheveux déployés autour de moi telle une sirène, évoluant sous le regard lubrique des hommes…

     Bon on peut toujours rêver ! La vérité est bien plus prosaïque : nage en brasse sur le point de couler, le cou tendu hors de l’eau pour épargner les oreilles, légèrement incommodée par les débris suspects qui flottent à la surface, éblouie par le soleil et ne voyant rien sans mes lunettes, je nageotte et barbote maladroitement parmi mes congénères, jusqu’à ce que le froid de l’eau me saisisse à nouveau, couvre ma peau d’une hideuse chair de poule. Mes dents s’entrechoquent, mes bras ne me portent plus, et j’aspire plus que tout à retrouver le sable chaud et mon poste d’observation favori. Je guette la vague salvatrice qui va me ramener à bon port, et court m’échouer sur ma serviette, haletante, épuisée, appréciant la morsure du soleil sur ma peau mouillée. Ma félicité serait totale si une âme charitable m’offrait une glace pistache…

    – Chérie, ça va ? demande l’homme, soudain inquiet de mon silence. Tu es contente ? Tu ne t’ennuies pas trop ? Demain on part randonner à la montagne ! Ce sera vivifiant et sportif tu verras !

    – Mmm…. oui, très bien..  je ne m’ennuie jamais moi tu sais… Heu, randonner ? C’est toujours prévu, vraiment ?

   Soupir intérieur. Désormais je ne verrai plus que des shorts informes, des mollets rebondis, et des gros godillots attaquant la pente. A moins qu’il n’y ait des thermes, des spa, ou des cascades glacées ?

    Comme un écho à mon billet, un article du Monde sur ce même thème, à lire ici

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2 commentaires

  1. Clarissa a écrit :

    Oui, notre société est pourtant devenue plus libérée, plus libertine, la littérature érotique se développe… et pourtant, nous sommes plus pudiques !

  2. Dalleray a écrit :

    Je me souviens de « L’année des Méduses ». C’est curieux de revoir ce film : les filles étaient en top-less du début à la fin. Aujourd’hui, on ne pourrait plus faire un film pareil. On s’aperçoit à quel point la société a changé.

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