La très belle exposition actuellement en cours au Louvre, Vermeer et les maîtres de la peinture de genre, m’inspire un scénario pour une future histoire.
Nous sommes au 17e siècle, dans la bonne société Hollandaise.
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Monsieur venait d’être terrassé par le coup de foudre après avoir entrevu une jeune personne accoudée mélancoliquement à sa fenêtre. Il lui déclara sa flamme dans une lettre passionnée :
Ma mie, quand vous m’apparûtes ce matin au balcon, votre doux sourire souleva mon âme, un élan fougueux me tendit vers votre gracieuse personne. Permettez que je vous écrivisse et vous confiasse les tourments de mon cœur… *
Pendant ce temps, goguenard, l’homme de main attendait. Voilà que Monsieur s’était encore amouraché d’une donzelle qui le prendrait de haut, et lui, il faudrait qu’il courre la ville qu’il vente, qu’il pleuve, pour remettre des mots doux plus urgents encore que des messages codés en pleine guerre ! Monsieur ferait mieux de choisir une souillon de sa maison, il l’aurait sous la main, au lieu de se consumer ainsi pour des chimères et des grands airs…
Madame s’ennuyait entre sa viole de gambe et sa dentelle, à peine distraite par son chien de manchon, et voilà qu’une occupation intéressante se présentait : un soupirant, une déclaration… elle tomba éperdument amoureuse dès les premières lignes, et s’attabla aussitôt pour répondre sur l’heure quelques mots bien tournés. Sa servante s’impatientait, attirée par l’animation du marché. Enfin Madame l’envoyait faire une course ! Elle n’en pouvait plus de nettoyer les sols… battre le pavé, sortir au soleil la réjouissait, et nul ne lui reprocherait de musarder en route ! Quand Madame aurait donc fini ses écritures ! Que c’était long…
Une correspondance s’établit, intense, ininterrompue. A toute heure du jour et de la nuit, la jeune servante était chargée de remettre de précieuses missives en main propres à l’homme de main. Lui était sollicité à son tour, il traversait toute la ville muni des réponses de Monsieur, bien moins nombreuses il est vrai que les messages de Madame. Il faut dire que Madame avait le temps, seulement occupée de chiffons et de musique, quand Monsieur commandait tout un régiment.
Madame ne réussissait jamais à échapper à la vigilance de sa famille, Monsieur était toujours pris par mille obligations. Mais leurs serviteurs, eux, se rencontraient sans cesse. Ils firent connaissance, échangèrent des mots vifs, se plurent à force de se frôler en secret dans les embrasures de portes.
La petite était farouche et trottait vite, mais il finit par remarquer qu’elle était mignonne sous son fichu avec son nez effronté et ses tâches de rousseur. Il commença par lui voler un baiser. Elle se sauva en riant, les joues en feu, toute émoustillée. Il était lancé, il s’enhardit. Ce furent d’abord des chatouilles, des enlacements, des danses, d’autres baisers… et une nuit, alors que toute la maisonnée sommeillait, il la troussa dans les cuisines et la besogna avec entrain.
Leurs maîtres progressaient aussi de leur côté. Madame venait de laisser tomber son mouchoir parfumé depuis sa fenêtre. Il avait été attrapé avec adresse par Monsieur qui l’avait humé avec extase.
* Concordance des temps et vieux françois au hasard, pour faire « ancien » et s’amuser.
Photos : exposition Vermeer et les maîtres de la peinture de genre
Breaking news : le nouveau media bonpourlatete.com qui vient de se lancer a publié mon article dans la rubrique « culture » le 21 juin, vous pouvez le voir là, bien mieux mis en page qu’ici. Ils m’ont fait très plaisir !
2 commentaires
Merci cher Dormeur ! Oui, ce sera très chaud du côté des serviteurs, très chaste du côté des maîtres
Très intéressant. On sent déjà l’histoire coquine pointer…