Samedi dernier, j’ai participé à la Wasteland, une immense soirée fétish qui rassemble plusieurs milliers de personnes !
Nous arrivons sur les lieux un peu plus tard que prévu, la foule est déjà dense devant l’entrée. Motivés comme jamais, nous franchissons allègrement tous les obstacles : le contrôle des sacs, la présentation du billet, la récupération du code du casier du vestiaire… On y entasse nos doudounes, nos gilets, nos bottes, et nous métamorphosons en créatures fétish, nous contorsionnant comme on peut au milieu des participants qui se costument aussi. La cohue est indescriptible, le chaos total, les gens se pressent, souriants, déterminés. Je me retrouve coincée au milieu d’hollandais géants, je perds tout mon groupe d’amis, les courants de la foule nous séparent les uns des autres. Débarrassée de toutes mes couches de vêtements (il fait froid à Amsterdam !) je franchis, légère, le barrage de la vérification du dress code (ouf !)
La soirée peut commencer, youhoo !
J’entre dans une première salle, assez calme ; les gens se promènent, attendent leurs amis, ou foncent déjà vers la piste de danse. Je reste un long moment, fascinée par le ballet des tenues qui défilent sans fin, retrouvant au hasard quelques amis et connaissance, Ness Harper, organisatrice des Goûters du divin marquis, Léa Montravers, une artiste qui va assurer plusieurs shows au cours de la soirée. Je bavarde, m’attarde encore dans l’espoir de retrouver mes amis, de plus en plus tentée de me jeter dans la foule de la piste de danse toute proche.
Je sympathise avec un chauffeur de maître, « condamné » à rester là toute la soirée, dans cette sorte de salle d’attente, à la disposition de son client qui peut vouloir rentrer à tout moment. Il semble ravi d’être là, sur le seuil de la soirée, et me lance force œillades et sourires jusqu’aux oreilles. Je l’ai souvent recroisé, posté non loin de la longue file des toilettes des femmes, place stratégique pour lier connaissance et distraire ces dames !
Je suis déjà prise par l’ambiance, la rumeur de la foule, la musique, pas très forte encore. D’immenses drapeaux rouges sont agités par des filles en uniforme de latex, le visage caché d’immenses casquettes fétish soviétiques. Les drapeaux sont si grands qu’une brise nous caresse la tête alors que nous tentons de repérer nos amis. Des films sont diffusés sur les murs, des statues néo soviétiques décorent la salle, et nous plongent dans le thème de la soirée : Révolution !
Une jeune femme danse sensuellement sur l’estrade, une danseuse pro sûrement, elle est si gracieuse… Elle descend, s’avance à ma rencontre, et je reconnais Notre Dame Lucretia ! Peu à peu, je retrouve tout le monde, l’équipe Dèmonia en mission de veille concurrentielle en goguette, des amis d’amis…
Je décide de quitter ce sas chaleureux, cette espèce de salle des pas perdus, pour rejoindre la marée humaine du dance floor. C’est comme franchir une porte vers une autre dimension ! Il y fait très sombre, la foule qui s’agite est éclairée de jeux de lumières incroyables, des torchères s’enflamment, des cracheuses de feu, des danseuses équipées de torches se succèdent sur scène… La musique est tellement forte qu’elle me pénètre toute entière, me fait vibrer des pieds à la tête, envahit chaque parcelle de mon corps, emporte mon cœur qui s’emballe. Je me sens totalement ivre de musique ; cette sensation d’ivresse, d’extase, que je ressens parfois en soirée, du seul fait de la musique, m’empêchera de boire la moindre goutte d’alcool, je suis déjà assez partie comme ça avec toutes les visions psychédéliques et chimériques que j’aperçois et ce son de folie ! De l’electro, bien dansant au début, et puis qui se durcit, qui imprime son rythme pour faire basculer la soirée, et la soirée a totalement basculé, très vite, elle est prévue pour ça, c’est même sa marque de fabrique !
Danser, admirer les shows au-dessus de nos têtes (Régulièrement, la foule des danseurs s’écarte, pour permettre à une danseuse de s’envoler sur des cerceaux, des rubans, et évoluer en l’air, enchaînant acrobaties et danses… Magique !), tomber par hasard sur des amis perdus de vue depuis des heures, les perdre à nouveau ou leur fausser compagnie exprès pour vagabonder en liberté, rencontrer des inconnus… plein d’inconnus ! Croiser toujours les mêmes, échanger des sourires à force… Les hollandais sont super sympas, bavards, taquins. Ils me sourient, me parlent en hollandais, avant de passer à l’anglais quand je préviens que je suis française. Ils m’entraînent dans leurs danses, me soulèvent dans leurs bras en rigolant, ils sont si costauds ! Je pense que je les amuse avec mon serre-tête en « oreilles de lapin », elles détonnent dans cet océan de tenues fétish plutôt dark…. (Elles m’ont été très utiles ces oreilles, des amis m’ont dit qu’ils me repéraient de loin grâce à elles 😉).
J’ai un peu oublié la ronde des rencontres, je me souviens d’un couple qui danse près de moi, la femme m’attrape, entreprend de promener sa sucette Chupa dans mon cou, c’est tout collant, poisseux, elle lèche le sucre avec application en souriant, son homme barbu caresse mes bras. Je m’enfuis en riant avant que la sucette ne se promène plus loin, je préfère reprendre mes déambulations, admirer les très belles tenues, moins travaillées qu’à la nuit Dèmonia il me semble, plus sexy encore. Je croise d’immenses hollandais, des géants, de jolies hollandaises aussi, mais la plus belle, de loin, c’est notre amie Notre Dame Lucretia, elle irradie de mille feux, attirant les danseurs comme des papillons de nuit, les subjuguant tous sur son passage, moi itoo.
Très vite, un gentil soumis sans collier se rapproche de moi, me suit, prend mon bras, jouant les cavaliers de soirées. Il me propose de tout me montrer, d’explorer les lieux de fond en comble, et j’accepte avec joie. J’adore être seule pour bien me plonger dans l’ambiance, mais c’est sympa aussi d’être deux, d’échanger nos impressions, de danser ensemble… Nous faisons une petite halte sur la mezzanine, il me masse les épaules, la nuque, je goûte son massage, accoudée à la balustrade, contemplant les shows et la folie de la danse en contrebas. Un petit compagnon charmant et attentionné, un soumis très caressant, mais je ne sors pas seule pour une fois pour me retrouver avec de nouveau un soumis de soirée collé à moi ! J’adore, mais là, j’ai surtout envie de sentir le souffle, l’ivresse de la liberté, j’ai envie qu’il m’arrive des surprises, des aventures, des mésaventures, des galères même… Aussi gentil et discret que soit un soumis de soirée, ce n’est pas la même chose de s’afficher « en couple » et seule. Je l’ai donc remercié au bout d’un moment avec une pointe de regret, luttant contre l’envie de le garder, contre la peur de me retrouver toute seule, mais une minute plus tard, je savourais ma liberté et je papillonnais partout, joyeuse d’être abordée, attrapée, de danser un instant ou une heure avec tel ou tel, avant de courir ailleurs. Freedom !
Je vais tenter de décrire le labyrinthe des espaces, des salles, avec leurs ambiances toutes différentes ! Je me perdais au début tant les lieux sont vastes et plein de surprises. J’ai même découvert une pièce en partant au petit matin ! J’ai regretté, cela m’aurait plu d’en profiter : « the bed station » je crois : de grands matelas posés sur le sol pour se reposer, au son d’une musique plus douce. Pire encore, le lendemain, lors du petit dej (tardif !) on me raconte qu’il y avait une petite piste de danse branchée rock eightees, et je l’ai manquée, moi qui adore les tubes des années 80 ! J’ai failli me faire hara-kiri sur le champs de dépit !
De toute la soirée, je n’ai pas réussi à quitter la grande salle, je suis restée vissée sur la piste de danse electro, avec ses shows, sa foule en délire, ses DJ, envoûtée par la musique, le rythme, en faisant quand même de nombreuses excursions dans les mondes parallèles proposés tout autour :
– Derrière cette immense salle, on trouve une autre piste de danse, plus petite, avec ses propres shows, et un espace câlin paraît-il, mais je ne l’ai pas vu. La musique me plait un peu moins, j’y suis restée peu de temps.
– A droite, on accède à une vaste tente qui offre un bar, une scène. La musique est plus soft, parfois étrange, on danse au ralenti. Des artistes chantent, miment des scénettes, proposent des massages sur le siège de Frankestein…
– Un peu plus loin, se trouve un lieu inclassable qu’on appelle entre nous « le donjon ». Il est équipé de canapés profonds, et même d’un magnifique lit à baldaquin. Cette salle est le lieu de tous les possibles, on peut se reposer, discuter, et faire plein de folies déjà. Mon regard est sans cesse attiré par des scènes troublantes.
Au bout, un véritable labyrinthe de panneaux offre des coins et des recoins, autant d’abris pour d’intenses ébats, beaucoup de gays en particulier se livrent les uns aux autres. Il y a des piloris, quelques banquettes, mais la plupart des gens restent debout. Les hollandais sont très énergiques, je l’avais déjà remarqué, ils aiment les vigoureuses étreintes par derrière. J’ai vu très peu de pratiques bdsm, à peine quelques coups de cravaches et des fessées par ci par là.
La musique est assez douce, on y voit clair, et nous sommes nombreux à déambuler juste voir, il faut seulement réussir à se faufiler à travers la foule des curieux !
Il y a aussi une sorte de piste surélevée, cernée de barreaux façon cages aux fauves, elle est tapissée d’huile, deux hommes nus s’y ébattent. L’un se masse langoureusement, visiblement « parti », l’autre se frappe vivement le torse, le ventre avec l’huile. Je me recule, j’imagine qu’il projette des gouttelettes d’huile partout ! Comment vont-ils faire pour se doucher ensuite, vont-ils restés huilés toute la nuit ? Dans cette foule où l’on se touche sans cesse tant elle est dense, on va tous en profiter…
Nous sommes si serrés les uns contre les autres qu’aller au bar, danser avec un verre, se révèle un vrai jeu d’équilibriste. Je suis régulièrement douchée par je ne sais quel alcool, sur les bras, les jambes… Une petite pluie rafraîchissante, un peu collante à force. Nous nous vautrons tous de plus en plus au cœur de la fête, plus loin, plus profondément ; nous avons tous franchi un seuil, plus rien ne compte, sauf la musique, la danse, les interactions entre nous, les contacts, au-delà de la langue, des différences culturelles. Il n’y a plus aucune barrière, nous aimons les mêmes trips et communions tous ensemble, et c’est infiniment bon de sentir cette appartenance à cette communauté que j’adore, avec ses milles variantes, mille fétichismes, une même communauté qui nous rapproche, dès que l’on pénètre dans la fête, lookés de pied en cap….
De mon coté, je suis surtout portée sur la danse, les contacts ; je suis curieuse des gens aussi, je regarde ce qui se passe, je déambule sans fin, observant ceux qui agissent, s’éclatent, perdent la tête. Je ne peux pas vous raconter les détails au risque de devoir mettre mon blog en accès réservé aux majeurs, je ne peux rien vous dire par exemple des intenses fellations dans tous les coins, parfois deux filles par garçon… l’avidité des filles, la satisfaction virile des garçons… trop excitant ! Si les gays sont présents en nombre, je croise très peu de filles entre elles en revanche, même si je me souviens d’une jolie infirmière rondelette et pleine d’énergie. Nos regards se sont croisés, elle m’a attrapé par la taille et m’a volé un délicieux baiser, avant de s’enfuir en me faisant un clin d’oeil.
– Le lieu le plus fou de la soirée se situe sous l’estrade de la grande salle, il s’agit de backrooms, une sorte de labyrinthe à nouveau, mais complètement dans le noir cette fois.
On n’entend plus la musique, seulement le bruit sourd des graves, qui fait battre notre cœur à l’unisson. Je me suis amusée à le traverser rapidement plusieurs fois, dûment chaperonnée, car ici, on sait ce qui nous attend, le consentement est censé acquis à l’entrée !😉 Mille mains nous caressent, nous frôlent, comme des algues, des tentacules dans une mer opaque, on avance à l’aveuglette ; j’ai failli me perdre, au secours, où est la sortie !! Je ne lâche pas mon garde du corps du moment, je m’agrippe à lui, il me protège, car si la plupart des inconnus dans le noir se contentent de caresses sur mon passage, d’autres n’hésitent pas à empoigner tout ce qu’ils peuvent et présenter leurs atouts ! Le secret, c’est d’avancer rapidement, en confiance, de repousser les mains trop impatientes sans hésiter…
Certaines femmes s’attardent au contraire, se mêlent aux hommes. Je devine une jeune femme cernée par 3 ou 5 hommes qui se rapprochent d’elle à la toucher, elle tombe à leurs genoux, les suce tour à tour, avant qu’ils ne la relèvent… Je dois m’enfuir, certains interprètent déjà mon arrêt comme une invitation à imiter ces voisins si chauds !
Tant de scènes troublantes, excitantes, la plupart invisibles dans le noir, sauf à la faveur d’une tenue fétish équipée de petites lueurs qui éclaire soudain l’orgie incroyable à l ‘œuvre. Partout des étreintes, fortes, intentes, avec la folie de la musique dont nous ne percevons que les basses qui nous emportent. Des filles sont prises contre un mur, sur la pierre d’une estrade, en rythme avec la musique lancinante qui rajoute à la folie. Un instant je me suis vue, m’abandonnant moi aussi à la musique, à toutes ces mains fébriles, étendue sur la pierre au côté de mes compagnes, m’offrant à ces inconnus dont je ne verrai jamais le visage ; des jeunes, des vieux, des beaux, des affreux… Ils ne me voient pas non plus, me devinent à peine. Une orgie sexuelle en aveugles, juste les sensations brutes, le désir sauvage, impérieux, des étreintes à la dure, trash, à même les rebords en béton. Mais je suis restée « sage » !
Vers 5h du matin, je m’inquiète un peu de la fin de la soirée : le rush vers les vestiaires, le moyen de transport pour rentrer… avant de ne plus m’en soucier, bien décidée à profiter de la soirée jusqu’à la dernière minute au côté d’amis enfin retrouvés ! Je ne quitte plus le dernier cercle de mes amis, nous sommes rassemblés sur la mezzanine, pour observer la fête de haut, et festoyer en plus petit comité, près de ce bar offrant de nombreux canapés et coins sombres. Diverses scènes se déroulent, et je me régale des jeux bdsm : un homme joue les chiots, se fait fouetter le derrière, un autre se fait griffer lentement, sadiquement, pour son plus grand plaisir, divers ébats sont en cours ici ou là…
Il est bientôt 6h30, il faut se décider à rentrer, les lumières se rallument, la musique faiblit… C’est un crève-cœur de quitter les lieux, de se rhabiller pour sortir dans le froid. J’aurais voulu que la fête continue encore toute la journée, et puis toute la nuit suivante… alors, peut-être, mon envie de fête aurait été comblée. Car là, je n’ai eu le temps de rien ! Je n’ai pas profité des ateliers (shibari, massages, bijoux pailletés, studio photo…), je n’ai pas assez dansé, je n’ai pas assez regardé… je n’ai rien fait…
Grâce à un ami débrouillard, on s’engouffre dans un taxi raisonnable (certains profitent de la fin de soirée pour multiplier les prix de la course par 5, là, le tarif est « seulement » doublé).
Un petit groupe souhaite prolonger la fête encore, c’est impossible que tout s’arrête déjà !
Mais je ne vous dirai rien de plus, ce qui se passe à l’after reste à l’after… ce que j’ai entr’aperçu, entendu, à travers le brouillard de mon demi sommeil, demi coma plutôt, m’a plongée dans un univers de fantasmes, comme une prolongation de la soirée, en plus intime, entre confidences et secrets, avec la musique pulsant toujours.
Une soirée incroyable, à la fois dark et lumineuse, intense et féérique…
Mon récit est désordonné, imparfait, mais je voulais tout raconter tant que mes souvenirs sont encore omniprésents et obsédants !
Amsterdam mérite aussi un billet à part… je m’y attele !
Pour en savoir plus
Le site de la Wasteland
La page Facebook
Photos : flyer Wasteland, Notre Dame Lucretia, moi, Wasteland
6 commentaires
A vrai dire je suis plus Guns and Roses, Red Hot Chili Peppers, Scorpion, AC/DC, Led Zepellin, mais je prends note de l’invitation…
Guns and roses j’aime beaucoup aussi ! 😊
Superbe récit ! Ca donne envie, vraiment ! Mais j’hallucine ! En plus vous aimez le rock des années 80 ?? Auriez-vous donc TOUTES les qualités?
Merci Léo ! Il faut venir avec nous la prochaine fois… Rires, j’ai plein de défauts aussi mais c’est vrai que j’aime beaucoup Depeche Mode, Queen, U2, Cure… et j’aime aussi Muse, Cold Play… !
J’y étais, bien sûr !
Pour décrire aussi bien cette fête… tu as du participer !!!